par Philippe Di Meo
Antifasciste intransigeant, un des « pères de la patrie » renaissante au lendemain de la chute d’un régime désastreux, juriste éminent, homme politique cultivé, critique d’art, fondateur de la revue Il Ponte, toujours active, Piero Calamandrei (1889-1956) ébaucha en 1950 la fable proposée aujourd’hui par les Éditions de la revue Conférence.
Deux grands thèmes s’entremêlent, celui d’une science potentiellement destructrice, le souvenir d’Hiroshima était encore cuisant et très présent dans les écrits italiens du temps, et donc celui d’une apocalypse possible. Le titre s’avère à cet égard parlant. L’opposition de la science et de la vie transparaissait dans toute sa tragédie. Piero Calamandrei n’avait-il pas consacré un numéro de sa revue à la responsabilité du scientifique, comme le rappelle son traducteur ?
Le texte s’ouvre sur une lettre d’un scientifique décrivant, comme s’ils avaient déjà eu lieu, les événements qui ont abouti à la disparition de l’espèce humaine. Le narrateur raconte par anticipation ce que nul ne pourra relater après coup. Autrement dit, à désastre advenu. L’apologue est transparent, l’inquiétude, totale : « pour pouvoir en parler, il n’y a donc pas d’autre moyen que de l’imaginer à l’avance, alors que nous sommes encore dans le temps ; et d’en faire à présent l’histoire ». Conviction allant de pair avec un commentaire que le lecteur ne pourra pas trouver indifférent : « l’histoire […] n’est que le récit de ce qu’on imagine être vrai […] ». Une méditation implicite devrait s’ensuivre.
Dessins de Caterina Arcipretre
Éditions de la revue Conférence
64 p., 21,00 €