par Michéa Jacobi
C’est mon frère Emmanuel qui m’a parlé le premier du livre de Joël Baqué. Il m’a dit : « C’est court, c’est limpide, c’est tout à fait ce qui me convient. »
Emmanuel est un perecquien de la première heure. Il prétend être un lecteur de très courte haleine.
Mon frère Joël a repris le flambeau. Il était enthousiaste. Il voulait adapter le texte pour le théâtre. Il l’a envoyé à un acteur de ses amis.
Un type de l’Hérault. Montblanc près de Béziers est en effet le centre du livre. Le Midi viticole y tient une grande place, la langue vernaculaire aussi.
Si je rédige ma critique ainsi, c’est pour faire sentir la forme de ce bouquin. Il est écrit en brèves réminiscences.
Mais on est loin de Je me souviens. Il ne s’agit pas ici de retrouver une époque ; il s’agit d’écrire une autobiographie ; une autobiographie familiale et littéraire.
Joël Baqué nous raconte comment, à travers ses expériences de frère d’une sœur très belle et d’un garçon attiré par les garçons, coureur de fond renonçant, plus jeune gendarme de France et C.R.S. affecté à la surveillance des plages, il s’est constitué comme écrivain.
Pièce à pièce. Un cairon (c’est ainsi qu’on appelle les parpaings dans le Midi, c’est en ce matériau qu’était bâtie la maison Baqué) après l’autre.
Tout bascule, lors de la période plagiste, quand il trouve un livre de Francis Ponge abandonné sur le sable.
Les paroles récursives du père constituent un des matériaux les plus importants du texte.
Détachées de la litanie des jours, elles prennent une résonnance étrange. Ainsi celles qui ont donné son titre au livre. Dans ses Apostilles, Gérard Genette, avait déjà commenté les apophtegmes paternels avec détachement et humour, Edouard Louis s’était, dans Eddie Belle Gueule, livré au même exercice avec beaucoup de froideur.
Mon frère Joël s’est écrié : « À côté de Joël Baqué, Edouard Louis, c’est un bouffon ! ».
Je reviens avec ma famille au début de ma critique. Gageons qu’elle est terminée.
128 p., 9,00 €