L’Intranquille – revue littéraire

 
par Philippe Di Meo

En ouverture du numéro 8, un texte de l’écrivain espagnol José Vidal Valicourt1 intitulé Lisboa song, d’une vigueur expressive peu commune. Saturé d’intersections et de perceptions induites par un lieu défini, le texte fait la roue autour de toutes ses résonances et autres associations selon une logique hypermnésique, panoptique et hypermémorielle. Un magma verbal résulte du rythme cahotant d’une écriture particulièrement mobile. Offrons-nous le plaisir d’une citation : « Dans l’entrepôt des théories, un préfixe somnole en attendant son tour. Un post ou un pré qui décide du lieu que nous occupons dans cette histoire que l’on appelle Histoire. » Un dossier Rabah Belamri illustré de poèmes, une lettre de Flaubert à G. Sand, une riche moisson de poèmes inédits et un ensemble sur les « Bohémiens, gitans » incluant des interventions d’Elisabeth Morcellet, Carole Naggar, etc. composent, avec les notes de lecture des plus rigoureuses de Jean-Pierre Bobillot et Françoise Favretto, une lecture roborative.

Dans le n° 9, la revue poursuit la publication en feuilleton du roman de José Vidal Valicourt, qui renouvelle l’art de la prose hors des sentiers trop souvent battus. Le roi ou On ne sait quoi, une pièce de Gertrude Stein remontant à l’année 1917, nous est proposée dans une traduction de Pierre Courtaud. Ce long poème mêle l’ordre historique, l’ordre domestique et l’ordre amoureux sur fond de revendication libertaire. Une rareté. Un dossier consacré à la « provocation », mêlant en un vaste album textes et interventions graphiques, évidemment surprenantes, occupe une place centrale. Patrick Werstink explore, pour sa part, une forme ancienne classique de l’Asie, le sijo coréen, qui a su conserver un attrait jusqu’à nos jours. Après Pound et Zanzotto2, Werstink entend s’approprier une forme non occidentale pour élargir le registre poétique reçu : les poèmes qui font suite écrits dans cet esprit en attestent. La variété des intérêts de la publication est si vaste, qu’elle inclut un très bel article de Carole Mesrobian sur l’épigraphe au début du romantisme. Enfin, les regards critiques de Jean-Pierre Bobillot, Jean Esponde, Françoise Favretto et Marie Cazenave.




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L’Intranquille
N° 8
L’Atelier de l’agneau
96 p., 15,00 €
couverture
L’Intranquille
N° 9
L’Atelier de l’agneau
96 p., 15,00 €
couverture

1. Né à Palma de Majorque en 1969, traduit de l’espagnol par Gilles Couatamanac’h.

2. Faut-il rappeler l’expérience des Cantos de Pound, et de Météo, d’un Zanzotto revisitant les haïkus (Maurice Nadeau, 2002) ?