par Tristan Hordé
Le nombre de dessins indique clairement que la pratique de Virgile Novarina est ancienne : il note la nuit, « entre deux rêves, lors du sommeil à ondes lentes », ce qui survient, qui est recopié plus lisiblement le matin. Il ne s’agit donc pas de se souvenir du contenu de rêves, à la manière par exemple de Leiris dans ses Nuits sans nuit, mais de tracer, la nuit, des dessins ou des phrases, sans savoir ce qui vient sur le papier. Le résultat, c’est une écriture hasardeuse qui n’obéit plus du tout aux règles observées dans l’éveil : le tracé n’est pas horizontal et les mots sont peu lisibles, et même non déchiffrables jusqu’à être seulement de l’encre étalée comme si le papier s’était transformé en buvard. Ils sont parfois accompagnés de dessins aux traits sommaires et ne s’assemblent pas toujours en phrases, mais les énoncés, mis au net le matin, restent non interprétables en l’absence de tout contexte, comme « ... parce que je ne suis plus en raison d’être là », « j’moccupe des seuls ». Certains sont en allemand ou en anglais, du moins partiellement, et ne sont guère traduisibles. C’est l’étrangeté des énoncés produits, autant que leur forme sur le papier, qui retient fortement l’attention.
avec une illustration de Jean-Luc Parant
Hochroth
26 p., 6,00 €