Dominique Meens : Dorman

 
par Tristan Hordé

Dorman fait partie de ces livres qu’on ne peut classer dans un genre : le lecteur pense d’abord entrer dans un récit qui s’ouvre, dans un Paris aux rues rebaptisées, avec la présentation de Brahms (« Pourquoi Brahms ? C’est le nom qui m’est venu, voilà tout, sans doute du goût qu’il avait pour les musiques du compositeur »), en train de traduire les Métamorphoses d’Ovide et dont les propos sont rapportés. On rencontrera d’autres narrateurs, avec quelque difficulté parfois à les distinguer. Rapidement les réflexions autour de la littérature et de la traduction nourrissent les échanges et les références s’accumulent au fil des pages ; entre bien d’autres : Barthes, Lacan, Thomas Bernhard, Carpeaux, Roubaud, Wolman, la revue Change, Kafka, Heidegger, Héraclite, Pinget, Musil, Tynianov, Debussy. Viennent une discussion sur le temps, une autre sur le cri du geai, d’où l’introduction d’un néologisme (« gréger ») pour son cri après la saison des amours. On lit un commentaire de Guillaume de Machaut, dont des extraits du Voir dit [Vrai dit] sont donnés en français moderne, suivis d’extraits des Métamorphoses, de pages de dessins de François Matton, plus loin d’une transcription des fables qui restent du grec Antoninus Liberalis (« Nous traduisons l’ensemble du recueil à notre façon »). Le récit est donc abandonné et l’on rencontre des remarques à propos de Jack Spicer, une saynète, des poèmes rimés, un dialogue avec le nom d’un poète russe... Le livre se poursuit par des essais à propos de textes de Wolman, Ponge et Gertrude Stein et se ferme sur une traduction d’un poème de l’opéra de Britten Our Hunting Fathers. Joyeuse érudition qui jamais ne lasse et conduit le lecteur à s’étonner de n’avoir pas lu tout ce que Meens cite.




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Avec 5 planches de François Matton
P.O.L
448 p., 25,00 €
couverture