Jean-René Lassalle : Série Hombroïch

 
par Narciso Aksayam

Jean-René Lassalle, qui avait clos, avec les triptyques de Triling, un passé de reliures chinoises dans le catalogue, aujourd’hui regrettablement occulté (Éthernellement ?), des éditions Cynthia 3000, dispense chez lnk un livret numéroté x 38 au format Italien réduit (A6 paysage, pour les connoysseurs), dont le jaune pâle enveloppe de radiance 16 pages agrafées (2 fois) sur papier bien blanc. Empreintes à la surface, ou ADN résiduels, d’Alain Cressan ? On veut le deviner ; partie du mystère à l’œuvre.
Mystère, oui, car si la forme textuelle se dégage en partie aisément – recto et verso structurés en symétrie autour d’un dernier vers repris en tête à la page suivante : Introïtus et Exodus de trois vers dont le mètre croît au recto et décroît au verso, suivis d’une masse de 8 à 10 longs vers – le plus souvent 9 – qui forment le corps dense d’un texte où la disparition des Majuscules (Haut-de-casse, pour les avisés) ne coïncide pas avec la complète disparition du point final, encore moins de toute autre ponctuation –, cependant l’abstraite signification des propositions s’accumulant devant l’œil vigilant du lecteur laisse l’âme pantoise si elle y cherche trop obstinément la figuration immédiate d’une ode ou d’une élégie. « Hombroïch » garde sans peine le secret, à moins de pressurer ses connaissances, de faire référence à tel sublime lieu d’Allemagne, friche artistique cinglant d’élégance et de pureté dans un ciel froid dressé de végétations et de briques. Saillances répétées, saillances assidues, le texte insiste sur un ciel nuageux turquoise qui pourrait être l’écritoire même. Une illusion grammaticale ferait accroire que les poèmes se scandent par appositions nombreuses, mais ce sont déterminants souvent manquants qui creusent ladite impression, en font une musique polytonale de futaies, de platipules, de grésil à granules, de cristaux mimés main, de carex insulaire… musique mallarméenne d’antépositions, Parnasse de mots rares, de néologismes adjectivés parfois, verbigérés aussi, bien plus souvent mots composés en condensats de sémantique concaténée, ou mots-valises aux syllabes ésotériquement enamourées. Le tranchant nombreux rompant l’anatomie propositionnelle multiplie jusqu’en l’intérieur du vers un effet Dépôts de savoir & de technique, mais fragmenté sans narration, arrêt pur de l’instant sensible, sur facettes asignifiantes d’un kaléidoscope diffracté de gemme à taille lexicale. Série de joaillerie. Aspire-t-on alors à davantage pour l’expérience que miroitements, reflets, angles de syllabes polies par l’art, polytimbres gidiens de paluds et de fauve atopique ? On devine à la source, dont flamboie de boussures la margelle, une morale d’abstention autant que bien décidée : insistance dans la joie prévaut / à persistance dans la douleur, éthique azuréenne pour saphir incandescent d’art :
Lucioles et coquelicots, vives / flammèches de parole / illisible.




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lnk x 38
16 p., hors commerce
couverture