par Sébastien Hoët
Emmanuel Echivard donne ici son premier recueil, un recueil beau et mélancolique qui résonne mat et durable : la trace dont il est ici parlé est bien plus qu’une trace, c’est-à-dire qu’une empreinte laissée, abandonnée, par une présence qui a disparu, s’est effacée de ce qui en reste. La trace palpite en l’occurrence, elle est le signe de quelqu’un qui passe certes, mais qui, passant, demeure : « (…) un homme est allongé. Les yeux grand ouverts il attend que vienne le jour. // Il a vécu. // tu es là » (p. 27). On ne sait qui est ce « tu » auquel tout le recueil s’adresse, vers lequel il tend, mais ce tu nous visite tous, ce tu est partout, humble, humilié : « On ne parlera jamais assez de tes pleurs. Tout les révèle. Tout ce qui est à terre, insectes noirs de peur, sable qu’écroule le vent épais (…) ». Ce tu tombe et ne cesse de tomber, le sol, la Terre entière, en tremble, et nous sentons ce tremblement au tréfonds sans parvenir à nous l’expliquer ou parce que nous sommes devenus insensibles. Il y a, dans cette tentative de préserver la précarité, la fragilité de ce qui passe, quelque chose de Pierre Dhainaut, et dans celle d’une vocation vers l’Humilié, le Disparu, quelque chose du Seul de Roger Munier. Dans une écriture profondément unique malgré tout.
112 p., 19,00 €