L’œil de la lettre

Pure or impure, it is yours to choose,
for no one can purify another
Dhammapada, The Self, 9

Centré sur la notion de sujet dans la philosophie du langage, Introduction à Chou poursuit et précise la pratique de la « contamination »¹ que Bénédicte Vilgrain explore depuis 2001, année de parution du premier chapitre de sa « grammaire tibétaine ». Poursuit et précise : poursuit l’analyse du « phénomène auquel » le nom « renvoie », son indépendance-dépendante de son état nominal, au sens de Wittgenstein² ; et précise en même temps l’intention (la trajectoire de la flèche décochée) de son programme, de sa maïeutique de l’araignée³, et qui consiste approximativement en une opération de transduction entre la forme-savoir orientale (sa symbolique, sa syntaxe, etc.) et la forme-savoir occidentale (ses post-modernismes).

À partir d’une critique de la structure accusative, Vilgrain parvient à questionner avec une sobriété étonnante toute la problématique identitaire contemporaine : l’auteur n’est ici que le traducteur d’une forme, empruntée à un autre auteur, dont les contenus résultent de la superposition de deux couches scripturales majeures : l’état con-textuel de l’auteur « source » (idéologie, biographie, etc.) et l’état post-identitaire (processuel) de l’auteur « cible », qui devient ainsi non pas auteur mais agent, agi par sa propre action, d’où l’on pourrait presque conclure que l’auteur de ce texte n’est que le texte lui-même.

Ce numéro 10 de L’Ours Blanc nous propose ici un lien, un « lien, comme : d’une qualité à ce qui la porte ».⁴