Fabrice Bourlez : Pulsions pasoliniennes

 
par Patrice Corbin

« Le dehors est un lieu étrange. Il ne se confond pas avec l’extériorité. Il décale les engrenages analytiques selon un perpétuel mouvement de décentrement », cet avertissement n’est en rien un mode opératoire de la pensée susceptible de définir l’œuvre de Pasolini, mais au moins préfigure-t-elle la possibilité d’un portail, d’une fissure dynamique entre réel mouvant et réalité momifiée. Pasolini, architecte d’un radical refus, contraint l’image filmique jusqu’à l’insupportable, réalise un autre corps où texte et image se coagulent entre plaisir et supplice, convoquant la psychanalyse pour la renvoyer à la cause perdue de l’organisation œdipienne. Les subjectivités s’inscrivent en multiplicité, leurs ombres préfigurent l’altérité, celle d’un « corps-texte » où s’opère une « démétaphorisation » pour reprendre le mot de Dominique Noguez1. Pulsions pasoliniennes nous invite allusivement à la congestion du signifié en évoquant Pétrole2, l’illisible incontournable, en scrutant la chair de Salò3 comme celle d’un corps qui ne se pénètre que du dedans. Fabrice Bourlez, citant Pasolini, conclut momentanément : « Rien de plus intolérable pour un homme que d’être toléré. »




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Les presses du réel
112 p., 12,00 €
couverture

1. L’adieu aux normes, Dominique Noguez, in le Cinéma autrement, Cerf, 1987.

2. Pétrole, première parution en 1995, traduction de l’italien par René de Ceccatty, Édition d’Aurelio Roncaglia, nouvelle édition augmentée en 2006, « Du monde entier », Gallimard.

3. Salò ou les 120 Journées de Sodome, Pier Paolo Pasolini, 1975.