par Claude Chambard
aux marges d’ombre tremblante encore
Entre la vive lumière et les marges de l’ombre le territoire d’écriture, de vie, de marche, d’attention, d’observation de Claude Dourguin est tout entier contenu dans ces pages, qu’elle nous envoie depuis nombre d’années. Cette femme singulière, cherche des chemins, des paysages, des peintres, des écrivains et des jours qui sculptent la chambre d’écho qu’elle habite résolument. Tout ici oblige à la réflexion ou à passer son chemin. C’est dire la richesse de ce livre ; le trouble qu’il cause aussi. Ainsi, on engage un dialogue souvent, comme tout véritable échange, heurté. Il faut, bien sûr, acquiescer au monde afin de pouvoir – pleinement – accepter ou nuancer, voire contredire, la réflexion de l’autre, la plus simple, la plus quotidienne, comme la plus complexe. Le lecteur trace son propre chemin dans les brefs paragraphes qui composent le texte. Dourguin est solitaire, passer quelques heures à ses côtés est un privilège, celui de réfléchir pris souvent de vertige sur la façon dont les mots, les sons, les images – on lira beaucoup de réflexions sur la peinture et les peintres – et, par ricochet, les sens, vont de soi aux autres. L’auteur contemple, devine, se souvient, creuse l’instant, le prolonge – à peine –, le décale parfois, et sa perception aiguë du monde est absolument inimitable, sincère et austère comme le sont Mantegna ou Alberti « quels frères décidément ! ». Elle dit l’étonnement quotidien d’être, elle dissèque habitudes et lassitudes dans un présent reconduit… où Stendhal est le contemporain de Gustave Roud et Patinir, de Bachelard… Une expérience, une réelle méditation.