par Mathieu Nuss
Le salon de la revue de l’automne dernier m’a donné l’occasion de découvrir la remarquable Hippocampe, revue pluridisciplinaire, d’une facture très soignée, à parution semestrielle, et dirigée par Gwilherm Perthuis. Comme nous le rappellent les rédacteurs, l’hippocampe est une zone du cerveau qui joue un rôle primordial dans le processus de mémorisation, et qui contribue à l’anticipation dans le présent grâce à l’exploitation et à l’analyse des traces du passé. Riche de créations, cette revue consacre sa douzième livraison à un dossier « Météorologie », qui allie des études à des divagations. Au fil des pages on évolue de surprise en surprise, à l’exemple des dessins au feutre et stylo-bille sur dos de cartes postales de Frédéric Khodja, ou de la présentation des surprenants Notebooks de Jean-Luc Manz par Claude-Hubert Tatot qui ont rejoint depuis peu le musée Jenisch de Vevay. Les parcourant, on remarque que la pensée prégnante de cet artiste est belle et bien composée, formulée dans ses carnets, en rien il ne s’agit de bribes, de croquis ou d’un quelconque « chantier ». Imprégné de problématiques contemporaines, le dossier « Météorologie » ouvre son champ au travail d’Ariane Epars, qui dans son Carnet(s) du lac, retrace via ses prises de notes quotidiennes tout ce qu’elle perçoit avec acuité depuis la fenêtre de son atelier, révélant à plus long terme l’identité d’un lieu (le lac Léman) dans ce qu’il a de mouvant et d’imprescriptible. Suit une longue variation-divagation de Jean-Christophe Bailly, dont l’étoilement de la pensée s’est ici construit à partir du mot « climat » pris dans son acception bourguignonne « d’aire viticole » (plus petite qu’une « appellation »), et régi par des facteurs physiques extrêmement spécifiques. Des dessins de Mélanie Delattre-Vogt enluminent et ponctuent l’ensemble. J’apprends, grâce aux proses poétiques d’Alexandre Mare, le mot « néphophobie » (peur des nuages). Jacques Roman nous livre « Une histoire du brouillard » : Et le brouillard venait raturer ce en quoi illusoirement j’avais cru. Ainsi j’apprenais qu’égaré, j’échappais à la dictature du réel et de la quiétude. Et je retiens encore ici et là les Mini-fictions de Christian Garcin.
Hippocampe, indispensable, à mémoriser en retour et à soutenir !