bp Nichol : Trois contes de l’ouest précédé de Tête de plage & Poesia totale 1960-2010 France

 
par Lorenzo Menoud

bp NICHOL & total POETRY

On lira pour la première fois la poésie de bpNichol en français – auteur anglophone, né en 1944 à Vancouver et mort en 1988 à Toronto, non seulement de poésie, visuelle, sonore et numérique, mais également de livres pour enfants, de bandes dessinées, de partitions musicales, etc., bpNichol dont l’écriture du nom, qu’il n’a cessé de modifier au cours des ans, « doit être considérée comme un poème visuel / processus, à certains égards, récapitulant nombre de développements dans sa vie et son travail », notamment par la « fascination dans la façon dont les lettres b et p se reflètent l’une l’autre »1 – d’abord : Tête de plage (1970), poèmes lyriques entre « mer » et « terre », à propos desquels l’auteur lui-même affirme : « je ne suis plus celui que j’étais quand je les ai écrits. ma musculature est différente et (par conséquent) ma respiration aussi. […] ce poème ayant été écrit à une époque où la terreur régnait sur moi comme jamais auparavant ni depuis » (p. 36), et ensuite : Trois contes de l’ouest (1967-1976), poèmes en prose, dont le premier, « L’ultime et véritable histoire de Billy the Kid », questionne avec humour et discernement ses propres conditions d’énonciation, inventant littéralement le personnage dont il racontera l’histoire nécessairement exacte, « un jour toutes les autres histoires finiront par sembler fausses à côté de celle-ci » (p. 43), dans un récit qu’il situe entre « l’ultime et véritable histoire de billy the kid », la première phrase du poème, et « l’ultime et véritable kid », sa dernière, tout comme il interroge l’origine d’un talent, celui du héros, explicitement rattaché à l’écriture et au sexe : « billy n’était pas rapide avec les mots et devint donc rapide au revolver. ils l’appelaient le kid et il devint donc plus rapide et plus méchant. ils l’appelaient le kid parce qu’il était plus jeune et plus méchant et qu’il avait une plus petite queue » (p. 44) – regrettant uniquement l’absence d’une introduction qui présenterait son auteur et un travail malheureusement méconnu.

On lira, sur une couverture dont l’esthétique nie d’emblée son objet, c’est la poésie visuelle et concrète dans le monde, Poesia totale 1960-2010, au sous-titre France, les doutes que l’on peut avoir alors, le reste on le connaît et on l’apprécie, concernent l’organisation des pratiques « avant-gardistes » de façon nationale, certes selon le droit du sol et non du sang, plutôt que linguistiquement, il en existe pourtant des exemples contraires, ainsi les dadaïstes écrivant, en 1921, en exergue de leur tract « Dada soulève tout » : « les Signataires [sic] de ce manifeste habitent la France, l’Amérique, l’Espagne, l’Allemagne, l’Italie, la Suisse, la Belgique, etc., mais n’ont aucune nationalité » – la double conséquence de ce choix étant qu’il manque à cette anthologie des poètes francophones importants (bien qu’un numéro belge soit prévu) et que la présence de certains poètes de nationalité française dans ce recueil paraît superflue, tant leur pratique concrète ou visuelle de la poésie est épiphénoménale.




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Trois contes de l’ouest
Précédé de Tête de plage
Traduit de l’anglais (Canada) par Christophe Bernard
Le Quartanier
72 p., 14,00 €
couverture
Poesia totale 1960-2010 France
Fondazione Sarenco
20,00 €
couverture