par Tristan Hordé
Armand Gatti (né en 1924) , surtout connu pour son abondante œuvre théâtrale, a publié ses premiers livres de poésie dès 1960. Il s’agit ici d’un long poème en vers libres autour d’une mer imaginée (la « mer Pascale »), prétexte à une sorte d’épopée généreuse où la baleine, « cinquième point cardinal », animal symbolique, joue un rôle majeur – on se souvient que Jonas, dans la légende biblique, est recraché par la baleine après trois jours et trois nuits, et « 3 » correspond aussi à une renaissance : « naissance mort résurrection ». Gatti propose une nouvelle Genèse, où au monde d’aujourd’hui, à « la loi du plus grand profit » avec les prisons, les cités sans espoir, les inégalités sociales, les guerres, la disparition de toute culture – le malheur pour la majorité des habitants –, se substitueraient une autre histoire, « un monde que nous n’avons pas », sans violence, « sans propriété, privée de classes ». L’utopie d’une nouvelle Arche est notamment figurée par l’abondance des plantes méditerranéennes, odorantes, mais il s’agit bien d’une utopie à construire : « Tout ici est supposé / car écrire c’est vivre / tout en sachant que la vie / ne sera jamais écrite. »