Yves Boudier : Revue des revues

 
par Yves Boudier

de(s)générations

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À la suite du numéro 22 « Penser avec l’Afrique », au cœur duquel un cahier photo (Andrew Cross, Mogadishu – National Assembly – 2013) entrait en écho avec la réflexion historique et philosophique menée sur le thème « Penser avec l’Afrique » (cf. l’entretien accordé à Arnaud Zohou par le philosophe sénégalais Souleymane Bachir Diagne ou l’excellente contribution de Jean-Godefroy Bidima « Penser, voir, éprouver : l’Afrique au risque de ses régimes d’historicité »), ce numéro 23 « Prévoir avec l’Afrique, agir dans le monde qui vient » élargit plus encore le champ d’investigation à l’art et au poème. Ainsi, l’anthropologue Jean-Loup Amselle, s’entretenant avec Arnaud Zohou, « Penser avec l’Afrique, penser contre l’Afrique (des post-coloniaux) », revient-il sur les questions d’émancipation et de culture, pour contester la vision « ethnologique » de Souleimane Diagne. La revue se donne alors les moyens de penser « Contre l’impérialisme noir » (Joseph Tonda) et pour l’émancipation du sujet africain (Pierre-Philippe Fraiture). On retrouve de nouveau Arnaud Zohou, cette fois comme poète avec six pages d’un poème haletant, saisissant, au fon, (extraits p. 74) : « peau / c’est souvent aller dans la tombe // cet homme / sa parole me touche / évacuer / excrément / jeter glaive / lancer tête pour personne // mais mourir / seulement / ira mourir ». En lien tragique et d’une rare beauté graphique avec la série de 12 dessins (encre et graphite sur papier) de l’artiste tunisien Nidhal Chamekh, « De quoi rêvent les martyrs 2, 2012-13 ».


Doc(k)s

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Anthologique. En exergue : « (…) ce chantier ayant été pour nous l’occasion de vérifier (encore !) que les medias ne se remplacent pas mais s’ajoutent en se spécifiant. » Les preuves, multiples et variées, suivent. Par ordre, paradoxalement dans cette revue où la mixité préside à quasiment toutes les propositions, on découvrira un ensemble consacré à Pierre Garnier (1928-2014), Pour une approche de la poésie spatiale. Textes d’archives, avec en premier lieu le Manifeste « Qu’est-ce que le spatialisme ? », suivi d’une étude précise d’Isabelle Maunet-Salliet qui, dès ses premières lignes, rappelle qu’Ilse Göttel-Garnier, l’épouse de P. Garnier, est inséparable de ce parcours véritablement accompli à quatre mains (cf. Poésie spatiale : une anthologie, chez Al Dante en 2012).
Puis, les rubriques Open et Retards regroupent cinquante auteurs sur 165 pages de textes, de montages, de graphiques, de poèmes, de photographies, de détournements de documents, de mises en perspective politique et critique, de restitutions de performances, dont le DVD offre de nombreuses séquences visuelles et sonores. La puissance de réflexion contenue dans ces pages se multiplie au rythme chahuté de l’ordonnancement des travaux. Les rapprochements, les frottements entre les œuvres créent une véritable dynamique, rare dans une revue.
Et, nous voilà prêts à nous plonger dans le grand dossier Black Market International. La lecture du DVD s’avère là indispensable et j’en fis la précieuse expérience en mêlant à ma lecture labyrinthique du dossier la vision des images proposées. De nouveau, s’instaure une autre épistémologie de la lecture, pardonnez l’expression, efficace et créatrice de sens inattendus, proliférants.
Enfin, la rubrique Archives, livre des documents « dans leur jus », fac-similé et scans, parmi lesquels des extraits de la partition d’une Chorale verbophonique d’Arthur Petronio (1953-54), et un poème « simultanéiste » d’Henri-Martin Barzun, L’Orphéide (fragments III, scène 1), prolongé par un entretien (2001) avec Ruth Francken (1924-2006) par Jacques Donguy.

 

Europe

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Je me plais à rapprocher ces deux numéros car la présence de la poésie les irrigue en profondeur. L’un (1031) est dévolu à Antoine Emaz, Gaston Miron et Serge Sautreau, (avec un choix de poèmes d’écrivains afro-américains, préfacé par Marilyn Hacker, qui constitue le cahier de création de ce numéro), l’autre (1033) est consacré à Claude Simon et à Friederike Mayröcker (Vienne, 1924) dont l’œuvre poétique « inclassable » est ici présentée par Aurélie Le Née.
Si, dans ces deux revues, on suit le fil du poème, on lira avec curiosité l’approche que Pierre Schoentjes propose d’Archipel et Nord de Claude Simon, deux courts textes qui touchent à la dimension poétique d’une prose par ailleurs revendiquée comme telle, que j’ose mettre en lecture parallèle avec Tons de blanc et les poèmes qui suivent de Friederike Mayröcker, une audace de lecteur plus que de critique, j’en conviens.
Pour continuer sur le mode d’un parcours de lecture singulier, on retrouvera (outre les commentaires lucides de Jean-Patrice Courtois, d’Emmanuel Laugier, ou celui de Gérard Titus-Carmel) Dominique Viart, au sortir de son « anthropologie élémentaire » de Claude Simon (1033), dans un entretien (1031) sur la situation d’Antoine Emaz dans la poésie contemporaine, au-delà de l’héritage assumé de Du Bouchet ou Reverdy. L’ambiguïté de l’écriture du poème émazien, entre vers et « phrase », est pertinemment interrogée et elle trouve ici quelques pistes de réponses, dont la conclusion revient au poète lui-même : « La question n’est pas ce que la langue prend, mais comment elle est prise. »
Revenir ensuite au cahier de création du n°1033, dans lequel on remarquera le travail de Danièle Robert, « Pour une nouvelle traduction de La Divine Comédie », avec un extrait superbe d’Enfer, Chant III. Quels « moyens mettre en œuvre pour faire passer en français la modernité du texte ancien » ? Comment « aller plus avant dans la beauté de ce chef-d’œuvre universel ? », telle est la double gageure dont triomphe à mes yeux Danièle Robert et dont elle donne ici quelques exemples des choix effectués, tant sur le plan de la métrique que sur celui de la délicate question de la rime. Dante et les stilnovistes n’ont pas fini de nous conduire sur le chemin de la contrainte bien pensée en alliance avec des libertés dont nous avons encore beaucoup à apprendre.
Enfin, on rapprochera Gaston Miron, le Québécois, et Serge Sautreau, éphémère résident rimbaldien yéménite, avec ces deux extraits en parallèle : « je n’ai jamais voyagé / vers d’autre pays que toi mon pays // un jour j’aurai dit oui à ma naissance / j’aurai du froment dans les yeux / je m’avancerai sur ton sol, ému, ébloui / par la pureté de bête que soulève la neige // un homme reviendra / d’en dehors du monde » (G. Miron, Pour mon rapatriement). « Un jour vient qu’il faut bien que sonne / L’heure sans rien ni plus personne / Le dénouement où l’on frissonne / De connaître moins qu’on ne croit / Moins que souffle au travers du livre / Que rosace vue dans le givre / Glace ou bien neige que délivre / Le feu qui creuse au creux de soi » (S. Sautreau, Matins du siècle).

 

Gare Maritime 2015

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Livraison annuelle de référence, « anthologie écrite et sonore de poésie contemporaine ». Tous les auteurs présents ont été invités en 2014 par la Maison de la Poésie de Nantes au Pannonica (scène jazz et musiques improvisées) pour une lecture lors des rencontres régulières « Poème en cavale » ou du festival MidiMinuitPoésie.
Divisées en trois parties, Auteurs francophones, Poètes étrangers (en bilingue) et Édition, ce sont quarante propositions poétiques, du texte seul à la mixité musicale, d’une écriture pour le livre à celles que permettent aujourd’hui les outils et les supports numériques, de la parole au chant, aux cris, jusqu’aux silences des respirations. Ce qui fait la qualité et l’intérêt d’une telle livraison d’une part, c’est l’hétérogénéité des invités et des pratiques dans une dynamique qui n’est pas sans risques, celle du voisinage, de la mise en parallèle de poèmes ou d’extraits de prose qui, de par la contrainte du support revue, entrent en échos, en presque rivalité pour dessiner chez le lecteur un espace inattendu qui mime en partie ce qui s’est passé in situ et dont le DVD joint conserve une mémoire vivante.
Chaque auteur, d’autre part, est présent au double titre d’une présentation, toujours soignée et soucieuse de mettre en perspective l’œuvre, et d’un extrait de son travail. Aux auteurs s’ajoutent ceux, très qualifiés, qui rédigent ces portraits.
Vaste choix donc, dans lequel je nommerai Sarah Kirsch, disparue en mai 2013, dont Jean-Paul Barbe souligne le timbre, un « sound » qui lui est propre, « une naïveté rusée », une « mélancolie rebelle », l’influence de Maïakovski aussi bien que celles de Bettina von Armin et d’Annette von Droste-Hülshoff. Puis Fabienne Raphoz : « dire le nom des choses / et quelque chose / se dénoue // qui n’est pas encore / le poème / et ce / pendant / un peu / plus / que lui / déjà / soudain // le chant du loriot » (Terre Sentinelle, Héros-Limite 2014), avant que de clore avec Patrick Beurard-Valdoye : « toporalité coïncidence du but et du début où est l’embouchure ? » (Gadjo-Migrandt, 2014). Une définition possible de cette belle entreprise.

 

intranQu’îllités

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Élégance. Mise en page très pensée et soignée. Couleurs et typographie se mêlent, se parlent et le fil de la revue se déroule en communions successives. Ce numéro hors-série réunit les meilleurs moments des deux numéros précédents, aujourd’hui épuisés. D’une part, un bel et riche hommage à Jacques Stephen Alexis (1922-1961), avec Dany Lafferrière qui souligne qu’il « plaça quelque chose d’autre au-dessus de la littérature : le bonheur du prolétariat », auquel, en reprenant ses propres mots, on ajoutera « le sens de la pureté du cœur, de l’amour de la vie, de la chaleur des hommes » (lettre à sa fille Florence, La Havane, 1955).
D’autre part, mais ce serait bien étrange de cloisonner, un ensemble autour de Jorge Luis Borges, avec en particulier un entretien enregistré en 1978 à Paris, dans le fameux « Hôtel », par Ramón Chao et Ignacio Ramonet, entretien suivi d’une conversation tenue en 2012 par Benjamin Barnier, Mariana Dómine et James Noël avec María Kodama, la veuve de l’écrivain argentin. Émotion et évidence du propos en écho à une intelligence du monde et des êtres hors du commun. Anecdotes, humour et dérision, aussi.
Glissée entre ces ensembles, la rencontre, par l’imaginaire, du Che avec des écrivains marqués par ce militant, cette figure de la révolution, en deçà et au-delà de l’icône qu’il est devenu malgré lui, depuis son apparition lumineuse jusqu’à sa fin, tragique, presque sordide de solitude et de rage.
« Un rêve déguisé en revue dans l’union libre des genres », c’est ainsi que James Noël qualifie l’ambition de cette revue. Cette phrase est juste car le poème dilate et déplace les limites, quelles qu’elles soient. Ainsi, « De la poésie avant toute chose » rassemble quelque trente poètes dont le commun se formule autour de l’idée du sursaut, de la marche en avant, parmi lesquels un poème d’Henri Poncet, disparu l’été dernier et dont on se souvient de son magnifique travail d’éditeur de poésie, Comment se préparent les révolutions : « les hommes / retroussent les manches / regardent le vin la femme / et l’automne qui rougit la fenêtre ». On attend, impatients, le numéro trois. Merci aux Passagers des vents.

 

Jouer 1

couverture

Sous la forme d’un fichier PDF, une première livraison sous le sceau de la traduction de textes anglo-américains, en l’occurrence celle de deux textes pour la scène et de poèmes. L’intérêt de ce travail, outre la qualité intrinsèque des auteurs, tient dans sa dimension « archives ». Il donne accès à des esthétiques très marquantes des années 70 et 80 avec, comme en rétro-perspective, une proposition théâtrale, L’identité un poème, (adaptation de L’Histoire géographique de l’Amérique) de Gertrude Stein, créée en juillet 1936 à Detroit. L’ouverture de la revue se fait avec Les Alpes, de Bob Perelman (Poets Theater, Studio Eremos, San francisco, 1982), un texte théâtral dans lequel le contraste entre le contenu et la facture classique est marquant. Particulièrement intéressante donc, cette « pièce » est suivie de Jambe, une pièce de théâtre, de Leslie Scalapino (San Francisco, 1984) qui, elle, anticipe sur une pratique aujourd’hui répandue, celle de l’hétérogénéité du matériau textuel pour la scène : ici, le texte se présente sous la forme d’un poème dont les articulations et la segmentation permettent une lecture où la question du genre littéraire se dissout dans un régime de voix en grande polysémie d’émotions. Un grand merci à Martin Richet pour l’ensemble de ses traductions, l’édition sobre et soignée de ces textes dont, pour clore cette note, je retiens L’intérieur du poème de Joseph Ceravolo (1971), dialogue poète-poème pour un art poétique exaltant.1

 

Muscle

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Se présente sous la forme d’un leporello (10,5 x 15 cm) six pages de texte, deux de couverture couleur. Pour chaque livraison, deux auteurs sans thématique annoncée mais dans une forme de proximité d’émotion. Par exemple, le n° 5 avec Simon Allonneau et Hervé Bouchard, interroge la place du décisionnel dans notre rapport au monde et à l’autre, multiple : « Dites qui sont ceux qui parlent et ce qu’ils font » (HB) versus « Il faut crier juste, il faut parler fort, mais il faut le faire bien » (SA). Marc Cholodenko précède Tao Lin dans le n° 4, mais son texte apparaît comme une réponse subtile à la question posée par celui de Tao Lin. Plutôt que Par-delà l’existentialisme, instruire la conscience du déport ou du déséquilibre : « (qui est) en nous l’entre moi comme le trait qu’il attend, dans le temps sans succession dont il me fend, de suivre pour s’y couler combler confondre : être pas : avoir jamais été : se fermer : oui : non : oui » (MC). Quant au n° 3, « avant que la vraie nuit ne survienne… » Julien Blaine en météorologue avisé ouvre l’espace de la transe qu’Antoine Boute occupe, « il faut spéculer le peuple à coup de défonce animale végétale nucléaire cosmique. » Dépliements, repliements.

 

Pro Memoria

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Un sommaire exemplaire dont la vertu est de rendre lisible et / ou visible, avec les textes proposés ici, la pluralité des formes d’écriture du poème aujourd’hui. De Jean-François Bory, qui use des possibles de la typographie en héritier du lettrisme, voire du spatialisme, mais qui reste attaché à une modernité post mallarméenne, à Michèle Métail avec ses poèmes sériels portraits-robots en treize stations, en passant par le poème reverdien d’Alexandre Ponsart, ou la mise en « formule T » du poème calendaire de Véronique Vassiliou, on regrette profondément de lire le dernier texte Hommage, dans lequel on apprend que l’on tient entre nos mains l’ultime numéro de Pro Memoria. En effet, ce n° 6 marque la fin de l’aventure et Alexandre Ponsart – avec une grande lucidité mais sans résignation – souligne avec quelques références majeures, l’importance du rôle des revues dans la critique et la création et rappelle ces propos, chers à Jean Paulhan : « Il y a dans le fait d’écrire une ambition collective, un désir de communauté que le livre est condamné à trahir et qui ne trouve son expression que dans le cadre de la revue (…) Il faut des revues parce qu’on y apprend à écrire. On y apprend aussi à lire. » J’ajouterai avec Caroline Sagot-Duvauroux : « Ou se taire pour toujours avant. Ne peut être mourir. / Écrire peut-être ».

 

Résonance Générale

couverture

« Dans les gestes, des histoires de voix », tel est l’incipit sous lequel les rédacteurs de cette revue, désormais reconnue dans le paysage poétique contemporain, présentent dans un texte liminaire à plusieurs mains, leur intention commune. « Si le poème tient la main (…) Si le poème tient la jambe (…) Si le poème tient le sexe… », triple anaphore, jeu de répétitions qui « font et défont nos mouvements placés sous des signes dont ils défont les assignations (…) quand dans la voix les gestes font encore chanter chanter ».
D’emblée sous le sceau de l’écriture du poème, le refus de traiter de la question poétique en termes seulement réflexifs est affiché. La place faite au poème comme modalité de réflexion et foyer d’émotion est donnée sans limites, elle se dessine et se justifie dans l’écriture de chaque poème, « carte blanche à ce qui vient / le défi porté dans l’expression même / dont tout le possible en nous hors de nous / s’augmente / à la vue qui s’ouvre » (Guy Perrocheau). Si « Les taureaux s’ennuient le dimanche » (encres de Stéphane Korvin), – de la même façon que le dessin traduit l’émotion du voir, « que signifie se traduire en mots ? » (Alejandra Pizarnik) –, le lecteur de ce n° 7 trouvera, dans l’arène ouverte de ces pages, non des réponses mais des échos, des entrelacs, des vibrations, le risque de la pensée et du sentiment : « deux sourires / dans la masse butée / noire d’un pluriel / une démocratie / qui court pour effacer / ta mort tu me fais / voir tout l’or / du monde sans / effacer nos immondices » (les rédacteurs). Avec Alexis Pelletier, Françoise Delorme, Jacques Allemand, Francine Charron, Sylvie Dubec, Yannis Livadas, Yann Miralles.

 

Traction-Brabant

couverture

Animé par Patrice Maltaverne et l’association Le Citron Gare, ce poézine à la pagination aléatoire est ouvert à tous, proposant poèmes et dessins, que les auteurs signent de leur adresse courriel, site et / ou blog. Si l’on ajoute à ces pistes de mise en relation les mentions que P. Maltaverne donne en 4e de couverture des quatre liens menant vers quatre blogs de créations et d’archives, on mesure l’heureux paradoxe de cette revue « papier » qui travaille avec Internet et ses possibles. Quant aux textes offerts, je m’interdirai d’en juger car, et c’est une vertu que la revue travaille, l’absence de thématique renvoie chaque lecteur à sa perception personnelle de tel ou tel poème, dans un désordre volontaire et assumé. Quel que soit, par ailleurs, le jugement critique que l’on pourrait porter sur une poétique très centrée sur l’hallucination de soi (parfois pour le meilleur), il faut affirmer que ce type de revues est absolument indispensable dans la culture poétique contemporaine.

 

Transkrit

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Plusieurs temps forts dans cette livraison avec, et ce n’est pas fréquent, un cahier photos de Carole Reckinger présentée par Jean Portante, « L’œil violemment doux de C. Reckinger », qui témoigne de la violence policière à la fois au Luxembourg ou en Corée du Sud avec une frontalité exceptionnelle. Ce qui se voit, ce qui s’écrit dans ces photographies n’est pas sans liens avec ce qui se joue dans les textes présentés ici. Par exemple, chez Steffen Popp (traduit par François Mathieu, Lucie Taïeb et Aurélie Maurin), dont les poèmes se nourrissent d’images très fortement structurées au profit de l’expression d’un contenu souvent politique, au sens le plus intense d’une tension entre écriture et rapport au monde. Ou chez la poétesse colombienne Piedad Bonnett, dont Jean Portante, qui signe les traductions, souligne la capacité à « taire presque tout, dire le presque rien (…) à sentir qu’il y a, à l’intérieur, un monstre qui attend chaque jour sa ration » … celle « des ombres insupportables sur les parois de la vie. » Enfin avec L’excursion, d’Elisa Biagini qui dans ce poème, se détachant des influences américaines, trouve à mes yeux ici un équilibre excitant entre le minéral archaïque et le corps présent au monde : « t’enlever le fil / rouge de l’omoplate, / te suivre dans les / os de la / terre, // nous, / refoulés par la lumière ».
Sans oublier que la revue s’ouvre sur un beau cahier de traductions (Odile Kennel) d’une série de poèmes d’Ariane Dreyfus, Les mots viendraient / Worte würden kommen.




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de(s)générations
N° 23
98 p., 12,50 €
Doc(k)s
4ème Série
N° 21/22/23/24
446 p. + DVD, 50,00 €
Europe
N° 1031 et n° 1033
366 p., 20,00 €
Gare Maritime 2015
Maison de la poésie de Nantes
112 p. + DVD, 17,00 €
intranQu’îllités
Hors-série I et II
Passagers des vents
200 p., 20,00 €
Jouer
N° 1
Bulletin Jacataqua
64 p. au format PDF, hors commerce
Muscle
N° 3, 4 et 5
8 p. par numéro, 3,00 €
Pro Memoria
N° 6
96 p., 6,50 €
Résonance Générale
N° 7
L’Atelier du Grand Tétras
184 p., 12,00 €
Traction-Brabant
N° 62
52 p., 2,40 €
Transkrit
N° 07
Kulturfabrik
204 p., abonnement 3 n°/35,00 €