Nadine Agostini : Dans ma tête

 
par Jean-Pascal Dubost

Choisissant la figure classique de l’anaphore (« tu ne / n’[...] pas ») en chaîne, la phrase négative pour base syntaxique, et le discours de l’adresse à destination d’un allocutaire anonyme (les accords grammaticaux laissant supposer une femme), Nadine Agostini dresse un énergique autoportrait de vie réellement fictive. La technique, éprouvée, a ceci d’intéressant qu’elle heurte le locuteur à un mur, d’emblée, et d’attaque, le « pas » de la négative est un frein, mais pour la circonstance, un frein moteur, qui porte le discours. Les phrases sont courtes et filiformes, semblent remuer un couteau dans la plaie (« tu n’as pas été anorexique ») ; parfois elles se répondent (« tu n’as pas eu peur d’être boulimique » suit la phrase de l’anorexie), et quelques fois ironiquement (suit la phrase de la boulimie : « tu n’as pas été élevée par une toxicomane »), ou bien longues et sans ponctuation, essoufflées, pour rattraper au vol une phrase affirmative ou rester suspendues sur de l’énigmatique encore plus. Avec l’apparente facilité d’une technique rabattue, mais au moyen d’effets d’échos sémantiques, lexicaux ou sonores, Nadine Agostini dresse un système de sens mystère.




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Dernier Télégramme
48 p., 9,00 €
couverture