par Christophe Stolowicki
Adolescent passionnez-vous d’un auteur, celui d’empreinte roussie à blanc, Schopenhauer ou Sade ou HM, dit Michaux. Vouez-lui dans votre indignité un culte exclusif, exhaustif de son œuvre mâchouillée, mâchonnée, et glo / et glu¹ déglutie. Copiez « cette parole [qui] va son chemin de traverse parmi ses impasses et ses fausses pistes, ayant la patience de l’approximatif pour amener l’éclair. » Plaquez, nouez à son Lointain intérieur² votre lierre de volubilis. Où se déleste son humour relatez face à cru. Volez sur ses laissées³ dans quelque contre-Abyssinie andine en un voyage initiatique de poète en herbe, de marihuanero routard. De mésaventures en déconfitures essaime d’HM le séide, le traducteur en prose dans une vie en prose. Nanti de main de maître, en peu de décennies vous naîtrez Frédéric Valabrègue émancipé à quelques mains d’un siècle à mains, la picaresque, la fantastique, la suspendue, l’érudite. Où Michaux moléculairement intérieur, syntaxiquement renversant, antéversé d’être et de non-être, en apologues tournant court sinon aporétiques trépane le condor à même la carcasse, vous saurez, d’hyperbole exacte chargé à mitraille, dans votre exercice d’admiration bottant au nadir transformer l’essai, dévot lucide tracer la ligne de partage des ô, retirer l’épingle d’un je plus attachant qu’haïssable. Passeport égaré, dans un consulat de Bogotá rebuté par une fonctionnaire au « visage de chignon », de perte en « perte sèche[s] dans une accumulation de paysages » persuadé que « l’expérience marche à côté de la vie comme un tricotage grossier », dans l’attente du « pays où une phrase ne se soucie pas d’elle-même », dépris de corps vous résoudrez en quelques visions foisonnantes, sous l’emprise des champignons hallucinogènes dont s’émaille la montagne sacrée de votre dénuement « un arc électrique de feu grégeois crépitant tout au long de l’échine » – les énigmes à pancartes du réalisme et du nominalisme qui hantent les philosophes. Dans un livre tout en paragraphes glisserez l’écharde translucide d’une ébauche de poème, juste pour « que la page feuillette une fenêtre ».