par Philippe Di Meo
Avec les rythmes comme sautillants et alertes de La Nébuleuse du songe et de la Physique amusante III, il semblerait que Jacques Réda veuille s’apparenter de façon originale au Raymond Queneau de la Petite cosmogonie portative1.
Dans l’une et l’autre de ces expériences – si insolites – de revisitation d’une tradition de poésie didactique, unique dans l’histoire récente du genre en France, dont l’épigone français identifié est notoirement l’abbé Delille, on décèle aussi un retour, et un prolongement, des présocratiques et, bien sûr, de la cosmogonie.
Contrairement à la plupart de ses contemporains, pour ne pas dire tous, Jacques Réda prend la donnée scientifique au sérieux. Il en fait même son thème. Chose trop rare pour ne pas être soulignée2.
L’opération est cependant plus complexe qu’il n’y paraît, car tout en énonçant dans une forme très travaillée son discours didactique, le poète faufile une déclaration de poétique à vague résonnance stoïque où l’humour, un humour délicat, et certaine discrète ironie ont leur place.
Une quête du sens, ni enthousiaste ni désenchantée, se profile : « Ainsi reprenons-nous les mêmes vieux refrains, / Heurtant de nos questions une absence de porte. »