Jacques Darras : Je sors enfin du Bois de la Gruerie

 
par Narciso Aksayam

Il y a beaucoup à apprendre ici. Jacques Darras fait la leçon, distribue les palmarès éthiques et esthétiques, sonne le rappel des oubliés du centenaire en cours, Whitman, Péguy, Stadler, Jouve… tout un cortège1. Un long discours morcelé de versets. Giclées d’adjectifs à foison, litanies de lectures exhumées, giroflées de latin sur lit d’appositions, presque du rap parfois dirait-on, jeux d’acronymes et d’imprécations. On y dit Toi, on y dit Moi, on y dîne du Nous, on s’y élance en lyrisme moult, en exclamations pléthore, au pas d’une Civilisation d’anaphore ! Celle des Sciences, des Consciences, des européanités ensanglantés ! C’est que 1914 concentre sa tranche de deuil ! C’est que 1914 ouvre la terre brumeuse et vociférée à sa Modernité ! C’est que 1914 arrache à la gueule du poète ses dernières ivresses palpébrales ! On pâme. On syncope. L’intelligence est en berne. Freud & Zweig sont en Suisse2. Une épopée s’élève des cendres familiales3. Des racines de peuples se gorgent du sang d’une âme. Celle d’un enfant de l’École et de la Khâgne. Et il en jute ce fruit de Bibliothèque et de commémoration4. Fruit aigre de nos moissons d’horreur. Fruit secoué sur les cageots sans nombre de notre mémoire, à la vitesse convulsive d’une loco sans freins vers un tunnel sans fond.




Share on FacebookTweet about this on TwitterPin on PinterestShare on TumblrEmail this to someone
Arfuyen
224 p., 14,00 €
couverture

1. On a des visions d’Abel Gance.

2. & aussi Romain Rolland.

3. Au Bois de la Gruerie : Grand-père Édouard Darras, mort pour la France…

4. Projet de commande à l’initiative de la BNU de Strasbourg pour la réouverture de son bâtiment d’Empire (1895).