par Alain Helissen
Très tôt commencée, l’œuvre de Yannick Torlini, forte déjà – il est né en 1988 – d’une dizaine d’ouvrages, continue de tarauder le désastre d’un monde jugé sur sa fin. Le texte ici ressemble à une phrase avançant en se répétant partiellement pour se charger progressivement d’autres mots ressassant l’échec, la douleur et le désespoir, ce fardeau, selon l’auteur, ancré comme une fatalité en chaque être humain. Ne reste-t-il plus qu’à faire partie de la rumeur du monde ou bien d’autres mondes sont-ils possibles ? La nuit de Yannick Torlini empiète largement sur le jour. Elle masque les idéaux et ce qui charpentait avec sens nos vies avant. Le corps aujourd’hui tente de « s’échapper de ce qui ne tient plus ensemble », additionnant sans illusion des fragments de langue collés. « Il faudra bien que tu finisses ta phrase un jour », écrit l’auteur, comme s’adressant à lui-même, lui qui n’a plus guère d’espoir de se libérer de ce qu’il nomme la « malangue ». En attendant il continue d’avancer d’un livre à l’autre, persévérant dans « ce travail du rien pour qu’il devienne quelque chose ». Comme un lent suicide programmé. « Il est temps d’advenir », conclut-il, sans doute provisoirement.