par Ludovic Degroote
Albane Gellé publie Les éblouissants dans une collection du Centre de Créations pour l’Enfance qui se trouve à Tinqueux, près de Reims : maquette sobre qui semble adaptée à la longueur des textes, dessins épars, l’ensemble est soigné et sa reliure à spirale change quelque peu des standards de l’édition actuelle. Le livre réunit vingt-cinq fragments, à raison d’un par page sur un format oblong 11 x 15 cm ; quant au titre, une note indique qu’il a été « volé » à « Denis Dupré, qui a eu la merveilleuse idée de rebaptiser les habitants (...) de Blou ». Chacun de ces fragments est un instantané de personnes croisées, parfois nommées, ancrées dans une réalité qui s’échappe d’elle-même par des décalages : « Elle descend toujours de voiture pour aider les hérissons à traverser plus vite. » « Il danse dans le salon en rentrant de l’école (...). Ce matin, il danse le mot platane qu’il vient de piocher dans sa boîte de mots à danser. » Cela mêle à des éléments réels un aspect qui ouvre à du merveilleux, de l’étonnant, ou incite à déplacer le regard pour sortir d’une réalité qui emprisonne. La force évocatoire de ces fragments vient de ce croisement mais aussi de leur savant agencement, précis et allusif à la fois. Cette apparente économie de gestes (non de langage) rappellerait la spontanéité de l’esquisse, dès lors qu’elle tiendrait d’une spontanéité savante.