Jean-René Lassalle : Rêve : Mèng

 
par Alain Cressan

La traduction et le carré : points cardinaux1 dans le travail de Jean-René Lassalle, qui les associe ici, dans ce petit volume.
Son abord – un idéogramme chinois sur la couverture, sans autre indication –, constitue une sorte d’énigme, espace onirique flottant entre deux langues quand on saisit le titre au dos. Son et tracé dans l’indécision sémantique. Le mode d’emploi est ici simple et indiqué : le livre se décompose en deux parties.
La première comprend des quatrains pentasyllabiques chinois de l’époque Tang, retranscrits au stylo, puis phonétiquement avec leur accentuation, et enfin traduits lexicalement par des mots d’une seule syllabe pour respecter le rythme et l’incertitude syntaxique. Le premier vers est répété et ajouté en fin de quatrain pour obtenir un carré. Quatre gestes, donc, qui font de cette traduction un exercice de translation d’un objet dans un autre espace, un autre plan, soulignant aussi l’arbitraire travail du traducteur, dans son lien à la matérialité des langues.
La seconde reprend le même système, à ceci près que les poèmes chinois sont de Jean-René Lassalle, et qu’il ajoute un geste : des traductions internes, à partir des monosyllabes français et selon des déplacements dans le carré, qui éclairent ou brouillent, selon le regard que l’on y pose.
Travail formel, répondant certes à une procédure précise qui pourrait sembler fermée, mais dont le résultat ouvre à un foisonnement de lectures, de réflexions… Et il ne faudrait pas omettre la beauté de l’objet et le plaisir qu’il procure : un livre indispensable.




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Grèges
72 p., 12,00 €
couverture

1. Lisez les Poèmes carrés, parus déjà chez Grèges, et la très intéressante étude consacrée à ce genre sur Poézibao. Quant aux traductions, de l’allemand ou de l’anglais, une simple recherche internet en montrera le foisonnement.