par Daniel Lequette
Pourquoi l’auteur de Todesfuge (qui connaissait le français et l’hébreu) use-t-il de la langue des bourreaux nazis (et donc d’une certaine manière contribue à son rayonnement), dans une œuvre dont l’extermination des juifs constitue le foyer ? En creusant cette question, Stéphane Mosès montre comment Paul Celan met la langue allemande à l’épreuve de la mémoire juive pour rendre sensible à chacun, dans des textes toujours uniques partant d’expériences concrètes, la catastrophe universelle de la Shoah. Appuyé sur des thèses fortement étayées (référentialité précise des textes, conception antimallarméenne de la poésie, prégnance de la culture juive), ce recueil d’études propose un parcours de lectures plurielles (linguistique, comparative, critique, génétique) qui a le mérite de rendre Paul Celan à son histoire personnelle, collective, esthétique, culturelle, plutôt que de l’enfermer dans une vision oraculaire, heideggerienne diront certains, de la poésie.