Dans l’éditorial de la dernière livraison de la revue Phoenix consacrée au poète Georges Drano, André Ughetto note que « les poètes ressentent du climat ambiant la charge mortifère, mais non sans tâcher de la faire basculer du côté de l’espoir. » La formule vaut pour Georges Drano lui-même dont l’œuvre a cheminé dans la lumière de deux figures tutélaires associées à leur territoire intime : la Provence de René Char, haute voix singulière au cœur des années tragiques, et la Bretagne des origines que Drano partage avec Guillevic. L’entretien du poète interrogé par Daniel Leuwers fait apparaître l’importance qu’a eue pour Drano la première rencontre avec le poète de Carnac, en 1962. Drano, en s’éloignant de la Bretagne pour le Languedoc, s’établit alors en « terre de vigne / terre à vivre », et il habitera partout le monde en poète (Pour habiter). Lucien Wasselin le définit comme l’« arpenteur d’un territoire » qu’il s’approprie par la parole et par tous les sens : « Qui a bu du vin / est entré dans la lumière de la terre. » Selon André Doms, il s’agit pour le poète (de Tenir) « de poursuivre en soi une démarche personnelle où il tente d’occuper une lisière du monde… » Le dossier réunit également des inédits du poète, un extrait d’une « Lettre décachetée » de Nicole Drano Stamberg et des contributions de Jean-François Mathé et Paul Badin. Au sommaire, Partage des voix donne à lire 12 poètes (Julien Syrac, Matthieu Baumier, Éric Dubois, Murièle Camac, André Ughetto, etc.), Mémoire : présentation par Philippe Biget d’un texte peu connu d’Alain Borne. La voix d’ailleurs est celle du poète suédois Bengt Emil Johnson 1936-2010. La revue comporte aussi les rubriques habituelles : Sporades (Jean Blot, Belinda Cannone, Emmanuelle Guattari, Marina Tsvetaïeva), enfin Archipel : informations diverses et notes de lecture. Revue bien vivante à l’écoute des voix du monde.