Philippe Agard : Plomb des grives

 
par Mathilde Azzopardi

Plomb des grives n’a pas trait à la chasse : dans ce recueil, volent librement, au ciel parfois plombé, quelques martinets, un goéland, une coccinelle… Plomb des grives a trait aux choses infimes – la paramécie, la câpre – qui, par le truchement d’un regard vif et empathique, surgissent dans leur « sensualité pénétrante », le sens jaillissant de la matière, du « malt des mots ». Et, dans le « rien » des interstices de l’égouttoir, se révèle une humilité, une fragilité égale à celle de la taupe ou du chant des grives – « Tchip-tip malhabiles / Babils donnant maigrement le change ».
La tonalité mélancolique, que l’on retrouve aussi bien dans le second volet, plus introspectif, du recueil, est mise en balance par une fantaisie, un rire, parfois, une alternative vagabonde, invitant au décrochage du présent vers l’ailleurs – le hêtre, « tronc peau couleur éléphant », « cou d’argent de femmes girafes ».
Ce bouillonnement – minéral, animal, végétal, sonore, mobile, malléable, bariolé –, rendu par la friction des mots, l’allitération et l’assonance, la scansion, l’extrême affûtage de la langue : « Les mots – si peu de synonymes / Chacun, farouche, tient sa note / Malice dans le concert furibond ».




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Champ Vallon
« Recueil »
72 p., 10,00 €