Fabrice Reymond : L’eau se rappelle la cascade

 
par Hervé Laurent

Aphorismes, fragments, poèmes (souvent philosophiques) en prose, les textes de Fabrice Reymond réunis dans ce volume permettent de préciser un projet d’écriture d’une grande originalité1. La lucidité du trait d’esprit, lequel y abonde, ramassé dans des formules percutantes2 suffirait pleinement à justifier l’existence de ce réjouissant petit livre. Mais l’ambition de son auteur me semble autre : il ne s’agit pas pour lui d’exposer une pensée toute faite mais plutôt de la dégager à partir d’un travail sur le langage. Une pratique qui ne va pas sans une certaine violence : Tirer le langage hors de lui-même, lui expliquer deux ou trois trucs puis le remettre à sa place. Par ailleurs, il convient de ne pas se laisser impressionner par la suite de définitions affirmées avec l’aplomb que permet (autant qu’elle l’implique) la forme brève. Très vite, leur assemblage apparaîtra parcouru de failles, lézardé par l’inquiétude. Le ton péremptoire n’est qu’un stratagème vite éventé. Je ne sais pas quoi faire de l’ensemble, je me rends à la grâce de ce qui vient, écrit Fabrice Reymond qui privilégie la disponibilité contre l’encombrement, refuse de thésauriser les concepts, choisit la poésie.




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(Anabase 5 & 6)
Mix
176 p., 12,00 €
couverture

1. Sa publication en livre a été inaugurée en 2009, avec la parution d’Anabase, éditions Mix, suivi, chez le même éditeur, par Canopée, en 2012. La forme fragmentaire est utilisée pour la première fois en 2002 dans le film Nescafer (diffusion en dvd par les Laboratoires d’Aubervilliers).

2. Ainsi lorsque, mi-amusé mi-irrité, l’auteur note : En général on travaille pour gagner de l’argent, moi j’ai besoin d’argent pour travailler.