Wallace Stevens : Harmonium

 
par Christophe Mescolini

Stevens publie Harmonium en 1923, annus mirabilis qui voit paraître Spring and all, Tulips & Chimneys, les Cantos « Malatesta »... Les stevensiens de stricte obédience – les commentateurs les plus autorisés du maître, outre-atlantique1 – ne voient dans ce premier opus que « minutiae préliminaires » au « Grand Poème »2, le corpus des longues méditations qui, dans l’œuvre ultérieure, constitueront Stevens en poète de l’essence de la poésie. Dans Harmonium, c’est en « fop of fancy » que Stevens se pense et s’exprime encore : postulations multiples d’une personnalité poétique qui tire de son instrument une surprenante variété d’harmoniques, puissamment sollicitée par « la terrible variété de ce monde ». D’où le mouvement circulaire et centrifuge, kaléidoscopique, du livre selon Marianne Moore, le large spectre de registres et de voix, de lieux et d’objets que déploie une table des matières bariolée. L’élégante précision du phrasé demeurera une constante de la facture stevensienne quand, dix ans plus tard, la sensualité capiteuse et « vénérienne » des poèmes floridiens sera effacée, sans restes, par une croissante discipline-austérité, dans Ideas of order3, au nom d’une « poésie pure ».




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Traduit de l’anglais et présenté par Claire Malroux
Édition bilingue
Points
« Poésie »
320 p., 8,10 €
couverture

1. Harold Bloom ou Helen Vendler, par exemple.

2. The Grand Poem : prelimary minutiae était le titre projeté initialement par Stevens pour ce volume.

3. Idées de l’ordre, traduit par Claire Malroux à l’Atelier La Feugraie (2000), s’ouvre par un poème significativement intitulé « Farewell to Florida ».