par Gérard-Georges Lemaire
Le titre est délicieux et plein d’esprit. Il fait penser à Francis Ponge et cela s’avère exact puisque l’auteur commence par une longue citation de ce dernier sur le pré. Mais qu’on n’aille pas y voir une sorte de pastiche de l’auteur de Pour un Malherbe. C’est une autre façon de concevoir un espace bien défini, mais finalement immense. Chaque poème fait une page et chaque page est un petit tableau. En sorte que le lecteur se retrouve avec un collection de tableautins tous différents, qui parlent de différentes choses présentes dans ce carré choisi et qui restitue de l’espace d’autres sensations, d’autres émotions et d’autres sentiments. Il faut ajouter qu’il s’agit aussi d’un jeu mi-sérieux mi-ironique sur la page poétique, qui est ici le « pré carré » de l’auteur. Joël Baqué a de l’esprit, mais aussi un vrai sens de la composition. Dans ce peu de mots disposés selon un ordre particulier, il parvient à évoquer un univers qui est pourtant délivrés par le biais d’un morcellement. En sorte que son poème reconstitue autre chose que l’œil a pu voir : voilà un déconstruction qui permet une construction d’un autre genre. La dimension expérimentale n’abolit pas la dimension sensible, mais la rend « baroque ».