par Régis Lefort
Ce livre est un ensemble d’entretiens croisés entre Alain Duault et Monique W. Labidoire. Comme souvent dans ce genre d’ouvrage, nombre de points sont abordés au sujet de la nature ou de la fonction du poème. Et chaque entretien est séparé du suivant par un poème de l’un ou l’autre des deux poètes. Un élément essentiel y est récurrent : la beauté. Qu’est la beauté en poésie ? Comment s’articule-t-elle avec ces deux notions que sont le réel et l’imaginaire ? S’en remettant à Rimbaud, Alain Duault affirme : « La passion qui empoigne l’homme à la nuque, et qu’il nomme la beauté, fait question. » Face à un monde vide de réponses, la recherche de la beauté pourrait « constituer une réplique à l’absurdité de l’existence ». Or, il semble que la beauté soit accessible dans la langue du poème de la même façon que l’est le réel, avec lequel elle entretient des liens ténus. Cela se fait par intermittences si l’on a la patience et la volonté d’attendre et d’écouter, ou bien si l’on se fait mouvant comme elle. Atteindre à la beauté est le résultat d’une expérience, il s’agit de l’éprouver, non de la prouver. Cette conception n’est pas loin, semble-t-il, de celle que développe Philippe Lacoue-Labarthe dans La poésie comme expérience. Toutefois, la beauté ne serait qu’un avatar du réel tel que l’invente un sujet. Elle est « cette lente violente déchirure du ciel qui fait croire à l’ailleurs ».