par Claudine Galea
Essai sur la réconciliation de deux genres, l’histoire et la littérature, qui s’affrontèrent et continuent de le faire depuis leur naissance respective. Longtemps considérée comme une non-science, l’histoire appartenait au domaine des belles-lettres. Passée du côté des sciences morales et politiques à la fin du XVIIIe siècle, elle ne veut plus rien avoir à faire avec la littérature. De son côté, la littérature a commencé à travailler sur le document, l’image, le témoignage avec les grands romanciers du XIXe siècle, et les romanciers se font historiens des humbles des âmes des marges des foules. L’histoire enrage de voir le roman nourrir l’histoire, le roman enrage de voir la rigueur attribuée à l’histoire lui échapper ou lui être déniée. Parfois les uns et les autres s’en arrangent, les romanciers ne se sentent pas tenus de dire la vérité, et se réfugient derrière le paravent de la fiction, les historiens ne voient pas pourquoi il leur faudrait adopter une forme narrative plus plaisante. Et puis au XXe siècle, il y a ceux qui font exploser les frontières, Braudel, Duby notamment pour les historiens. Ivan Jablonka montre au long de ce livre érudit et passionnant que l’exclusion et l’exclusivité ne valent rien à la connaissance, ni même à l’intelligence. « Trop de littérature et l’histoire meurt. Pas assez de littérature, et il n’y a plus rien. »