Cette nouvelle publication fait état d’un colloque de Cerisy qui s’est tenu en 2014 en hommage à l’impérative figure et parole de Henri Maldiney (1912-2013). Philosophe de l’action, à travers principalement l’enseignement et l’observation si vifs qui furent ses modalités existentielles, ayant caractérisé sa présence devant ce qui est et ce que nous sommes. Héritier de la phénoménologie husserlienne et de l’ontologie heideggérienne, Maldiney s’est exposé au factuel de la Daseinanalyse (une phénoménologie de l’existant) auprès de Ludwig Binswanger, dont la pratique et les outils opératoires passaient par le socle de l’appréhension freudienne et d’une influence heideggérienne. Cela pour dire que même s’il fut le contemporain et ami de Paul Ricœur (1913-2005), son cheminement et la gestation de sa pensée ne seront pas passés par du théorique, mais davantage à travers un énoncé qui prend comme épreuve révélatrice l’art d’un côté et la psychose de l’autre, comme deux modalités qui peuvent éclairer et rendre compte de ce qui s’entend par existence. Le pathique¹, le sentir, plus que le perceptif, l’espace et la présence forment les sources d’un être-avec à partir d’où Maldiney scandait, dans sa langue accentuée par le questionnement sans cesse réitéré de ce qui n’a de fin ni d’originel à même la perte, la ruine et l’échec qui en disent plus que les attributs héroïques de la représentation. La qualité des textes réunis prouve que l’apport de pensée, malgré cette régression et sclérose qui gagnent le champ de la philosophie comme celui de la psychiatrie, est bien alerte. La fidèle présence de Chris Younès se retrouve de nombreuses fois à travers cette partition en sept axes qui parcourent cet ouvrage nécessaire : s’ouvrant avec le sujet de cette unique Triade qui réunissait le peintre Tal Coat, André Du Bouchet et Maldiney ; son rapport à l’histoire de la philosophie ; l’homme malade à l’épreuve d’exister ; la question qui relie Habiter et Exister ; son enseignement ; son rayonnement à l’étranger ; et enfin neuf textes sous la forme d’un atelier de doctorants. Il faut surtout souligner la coda de l’ouvrage se terminant dans l’ultime parole recueillie par Chris Younès à travers ce dernier entretien auprès de son maître : La représentation n’est justement pas la présence. Le mot « présent » doit être pris dans son sens propre praesens, être auprès, être auprès de soi, hors de soi, hors soi, en avant de soi. Soi-même plus avant. Toujours cette ouverture inaccessible, inabordable.