La poésie, entre vers et prose

 
par Sébastien Goffinet

Bien que le processus régulier qui aboutit à la rédaction de telle note de lecture par telle ou tel chroniqueur soit très démocratique (donc très chiant), il recèle un potentiel ludique que radicaliser me ravit. En effet, CCP dresse une liste trimestrielle des parutions inadmissibles, et l’envoie aux chroniqueur-se-s, qui y picorent et proposent des notes de lecture. Exhaustive, cette liste doit se limiter à trois éléments pour chaque publication : nom-prénom de l’auteur, titre et éditeur-trice. Chaque fois, une partie de cette liste ne m’évoque absolument rien. Ma curiosité s’en aiguise. Mon jeu consiste alors en l’application variable de critères improvisés, puisque mes lacunes incitatrices leur interdisent d’être littéraires, pour établir mon choix. Cette loterie (c’est le principe) parfois me comble : ainsi en va-t-il de l’enthousiasmante découverte de Raphaëlle Bouvier, due à ma fascination pour le prénom qu’elle aussi porte (et n’usurpe manifestement pas), seule raison de ce choix. Logique : le sort se montre aussi défavorable. De La poésie, entre vers et prose, pourtant sélectionné « rationnellement », se déduisent des enseignements terrifiants : 1°) rien ne me prémunit contre les titres et les cautions universitaires racoleurs 2°) un doctorat n’élimine pas les conceptions étriquées (notamment essentialistes) « quant à ce qu’ils nomment poésie » 3°) ma jocrissité2 4°) ma déontologie étique : la lecture du livre a été abandonnée p. 162 (l’implicite du contrat me liant à CCP n’a pas été respecté). Mais nulle gêne à facturer cette chronique au tarif habituel. 5°) il y a des gens – le livre le prouve – payés pour travailler sur Paul Claudel3.




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Sous la direction de Christine Dupuy
Presses Universitaires François Rabelais
296 p.1
couverture

1. vous éviterez de gaspiller 18 € en ne l’achetant pas (ce n’est pas non plus, sauf pour les kleptomanes, utile de le voler). (Cette remarque est vraiment poilante, je pense qu’il est judicieux qu’elle y reste ! CB)

2. Encore une référence explicite à Denis Roche, cette fois en tant qu’éditeur de Pynchon.

3. Malgré les apparences, « travailler sur Paul Claudel » ne doit pas être compris comme un paradoxe ; la formulation exacte serait « travailler à s’auto-justifier de prétendre travailler sur Paul Claudel ».