Danielle Collobert / Jacques Hémery : Survie / Bruits d’écrits / La seule chose

 
par Sébastien Hoët

Les éditions crbl nous donnent un objet magnifique – un carnet blanc semblable dans sa forme aux carnets de croquis des dessinateurs qui saisissent sur le vif (comme le recommandait Diderot), strié en couverture de formes estompées, de lignes d’écriture, blanc-sur-blanc, lequel, ouvert, offre au curieux sa moisson foisonnante : 37 encres, 37 jaillissements inspirés de Jacques Hémery, et un CD restituant les performances vocales, instrumentales, musicales, ou mieux : sonores, de Sophie Délizée, Gérard Fabbiani, Elisabeth Bartin et Michel Doneda. Ces performances intéressent l’amateur de poésie au premier chef dans la mesure où elles mettent en son des textes de Danielle Collobert comme Survie ou quelques blocs de Dire I-II, Il donc, et Recherches. Le résultat d’une pareille conjonction de media artistiques fait d’abord songer aux mondes extraordinaires (au sens strict) de Meredith Monk ou de Maja Ratkje, ces mondes peuplés de voix qui se vocalisent sans se soucier du mot ou du sens, ou de l’expression, et dansent leur danse sylvestre inquiétante avec l’animal aboyant, furetant, stridulant, que capte ici la clarinette basse rendue à la matière du son, à cette texture atonale, amodale, parfaitement autonome, que l’on appelle le timbre. Puis survient la lecture du texte de Danielle Collobert, Survie, par exemple : «  je partant voix sans réponse articuler parfois les mots / que silence répondre à autre oreille jamais »1, et c’est le silence qui se fait, une étonnante évidence du texte le plus énigmatique de la poétesse.




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Éditions crbl
Trois pans 25×16 cm, un livret, un CD (60′), un carnet de 37 peintures, 30,00 €
couverture

1. Danielle Collobert, Œuvres I, P.O.L, 2004, p. 415. Les textes lus figurent dans le rabat du livre ici recensé.