Mathieu Nuss : Arrosé l’arroseur

 
par Alexandre Ponsart

Couverture blanche et titre vert comme une plante sortant de la neige. Outre le titre faisant écho au film L’arroseur arrosé de Louis Lumière, l’auteur met en avant dans son ouvrage Arrosé l’arroseur des instants de vie.

Il plut très fort début septembre (…) Premier jour à l’heure d’hiver (…) la matinée ne cède pas un mot pour que je m’enfonce, semble-t-il, dans la lecture. (…) Coup de froid, assonances réveillées depuis la plus profonde couche du vent, celle qui se déploie décidée, et intimide.

Le livre est structuré autour de sept parties dont l’organisation ne semble rien laisser au hasard : « Arrosé l’arroseur » ; « Monochrome du grutier » ; « Vert bouteille » ; « ¥ » ; « Vert bouteille » ; « Plateau – peinture » ; « Tard donc j’enchaîne ». Chaque partie est constituée de plusieurs proses qui laissent, parfois, la place à des fragments de poème. Ces morceaux de poésie sont centrés sur la page.

, au diable cette rivière
de poème qui enfle sans
aucune connaissance du
génie hydrolique, quelques
gouttes d’eau suffiraient
pour la finition,

Il est possible d’imaginer qu’il s’agisse de notes que l’auteur a rédigé au fil du temps. Tel un journal intime où la présence du je est régulière. L’humeur contribue au contexte du poème du jour (…) le poème est le double mental conservé. (…) Je n’ai pour maigres effets personnels qu’un restant d’air et d’encre, deux espèces adaptées, qui savent parfaitement emprunter l’étroite jonction de page se refermant.

Écrire par fragments permet d’évoquer de brèves scènes de vie. Ce choix rappelle à son tour la brièveté du film (environ 50 secondes) L’arroseur arrosé. Tout comme le soulignait Roland Barthes dans Roland Barthes par Roland Barthes : « le fragment (comme le haïku) est torin ; il implique une jouissance immédiate  c’est un fantasme de discours, un bâillement de désir. Sous forme de pensée-phrase, la germe du fragment vous vient n’importe où : au café, dans le train, en parlant avec un ami (…) ; on sort alors son carnet, non pour noter une ‘pensée’, mais quelque chose comme une frappe, ce qu’on eût appelé autrefois un ‘vers’. »




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Rehauts
96 p., 16,00 €
couverture