par Jean-Pierre Bobillot
Esponde voyage dans l’espace et le temps. Des courts-circuits, tristement signifiants, s’opèrent : fouler, dans la Grèce de ce début de XXIe siècle écrasée par une Europe oublieuse de ce qu’elle lui doit, les lieux mêmes où la Grèce au IIe siècle av. J.-C. fut détruite par une Rome insoucieuse de ce qu’elle lui devait, telle est la mise en perspective, depuis le « parking désert du site archéologique » de Corinthe, car « le musée est fermé ».
Il voyage avec des livres, des livres voyagent avec lui. Ça fait vases communicants. Et vases communicantes : bris et bribes dans la vase du temps, traces mêlées dans l’espace parcouru, arpenté, de la mémoire, telle se fait l’écriture, méditative, ajointant écrits de jadis et de naguère. Ainsi dialoguent ou monologuent Héraclite, Polybe, Mummius, Diaïos, Philopoemen « le dernier des Grecs », Andonis Fostieris le post-héraclitéen et son « vase de consonnes oublié sur l’étagère », via Hegel par qui, pour ce qu’elle fit à la Grèce, Rome fut « qualifiée d’infâme », Hölderlin qui « n’est jamais venu en Grèce pourtant », ou Rimbaud, que poursuivent au-delà de la Grèce les lettres A et R, comme un signe du destin1.
1. Ce volume faisant suite à Éphèse, l’exil d’Héraclite et La Crète d’Ariane et Minos, croise ainsi la série Couleurs Harar, Mourir aux fleuves barbares (Arthur Rimbaud, une non-biographie) … Sur Éphèse, l’exil d’Héraclite, voir CCP 27.