par Ludovic Degroote
Qu’il soit destiné aux enfants ne leur réserve pas un livre de poèmes. Outre la part d’enfance qui ne meurt pas dans le poète adulte, il y a le plaisir de voir jouer les mots dans une ingénuité libre – ou une liberté ingénue. Ce livre est écrit, si l’on peut dire, à quatre mains : Amandine Marembert a rassemblé des mots d’enfants recueillis de la bouche de sa fille et du fils de l’illustratrice : elle n’a donc pas écrit à proprement parler mais a rapproché ces paroles de façon thématique. Celles-ci sont illustrées d’une manière vive et généreuse par Valérie Linder, dont les dessins mêlent objets visuels et lettres ou mots, rebondissant sur les textes sans les répéter. D’un point de vue poétique, puisque c’est l’objet de cette note, la spontanéité des enfants les autorise naturellement, à travers le langage ou l’approche du réel, à une créativité qu’on pourrait leur envier et à laquelle on aimerait parfois accéder... Exemples : « La mer nage dans les bateaux. / – Je suis affamé de soif. » « J’ai les jambes toutes boutonnées de moustiques. » La poésie ayant souvent affaire à des systèmes de rupture ou de décalage qui placent la langue au cœur d’une vision critique du monde, on peut considérer, pour faire écho au titre, que les paroles de Rose et Martin sont poétiques. De même, les illustrations. Voilà donc un livre à mettre dans toutes les mains.