P.N.A. Handschin : L’Énergie noire

 
par Alain Cressan

Dans ce huitième volume de la passionnante somme Tout l’Univers, P.N.A. Handschin s’attaque cette fois-ci au romanesque, à la fabrique des histoires, au genre narratif dans ce qu’il reformule dans son geste incessant de fablier.
Suite, dirait-on, d’incipits qui semblent pourtant, par l’usage constant de la proposition participiale, attaquer le récit in medias res, dans le lieu-énigme de l’absence de repères, si n’était la structure réitérée – différence et répétition ‒, avec ses personnages récurrents, à l’identité protéiforme (Anthéa, Jessi, Pierre…), il déploie un espace de plus en plus large, diffus, au fur et à mesure que l’on avance dans ce « roman ».
Comme à l’accoutumée, l’auteur joue sur la longueur des phrases, des périodes, avec leurs jeux de parenthèses intriquées, de tirets, leur effet d’accumulation de détails, nous y perd, provoquant dans cette lecture qui suppose un continuum dans le récit, un effet d’instantané dans sa prose luxuriante, comme bloqué par l’abondance, « et à travers laquelle (coulée) se frayer un chemin est pratiquement impossible et sous laquelle par contre tout un labyrinthe de caves s’enfonce très profondément » (p. 92). Et de fait, il se trouve toujours un piège, chausse-trappe, jeu d’écho par un détail infime mais suffisamment précis pour qu’il s’inscrive dans la mémoire du lecteur (telle forme de rétroviseur par exemple), multipliant les jeux de miroirs et les mises en abyme dans cet enchevêtrement baroque qui séduit, fascine autant qu’il use, lasse, l’acuité du regard. Une expérience rare, précieuse : absolument, il faut lire Handschin.




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Argol
156 p., 18,00 €
couverture