Emmanuel Régniez : Notre Château

 
par Ludovic Degroote

Une ambiance étrange et gothique prédomine dans ce premier roman d’Emmanuel Régniez1. Un frère – le narrateur – et une sœur vivent depuis la mort accidentelle de leurs parents dans une vaste maison appelée Notre Château, dont le père avait hérité d’un ami à la condition de ne pas y vivre. Des liens indéfectibles les unissent entre eux et à cette maison dont ils ne sortent jamais, à l’exception du frère qui va une fois par semaine à la librairie pour achalander Notre Bibliothèque, cœur de la maison. Dans cet enfermement qui semble aussi résolu que programmé, tout est huilé comme un rouage parfait. Bien sûr, un grain de sable permettra d’en montrer la mécanique étrange par le biais de ses dérèglements. L’intrusion de la bizarrerie laisse place au suspens, sans qu’on sache très bien quels sont les lieux qui en sont la cause : cette maison aux allures gothiques, l’histoire de cette famille revisitée par des souvenirs de contes, la relation fusionnelle ambiguë de ce couple frère-sœur, les tréfonds fantômes ou schizophrènes de ce narrateur, l’examen méticuleux d’une réalité qui mène à la folie ? Mises en abyme et labyrinthes s’emboîtent jusqu’aux scènes finales qui dévoileront une partie de l’énigme. Si l’on ne peut à proprement parler de forme poétique2, on notera que les mots y jouent un rôle central dans la bibliothèque, et aussi dans le rapport à la réalité : « Notre rêve a pris forme dans un monde de mots (...) que nous avons, patiemment, construit mot après mot ».




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Le Tripode
160 p., 15,00 €
couverture

1. Auteur de L’Abc du gothique aux éditions Le Quartanier en 2012.

2. Le langage courant rapproche le mot poésie, dans son acception non poétique, du mot étrange.