par Pierre Parlant
Envoyés bi-mensuellement par Martin Richet, leur traducteur, les « Bulletins Jacataqua » se proposent de donner à lire des extraits d’« Un Journal » de Robert Creeley1. On trouvera ici les notes de six journées successives – Creeley a atteint la quarantaine –, trois de novembre 1968, deux de janvier 1969, une de février de la même année. Écrite dans la hantise de ne jamais bien savoir si l’on possède les mots ou s’ils nous possèdent, cette suite de notes journalières entrecroise l’anecdote et l’observation avec une obstination réflexive systématique, « comme si […] la pensée était une ligne qu’il fallait suivre ». Ce qui est en jeu est très clair et peut se formuler ainsi : il s’agit de ne pas perdre en écrivant l’énergie qui soutient le langage. Creeley rapporte alors sans chichis le mot à l’expérience de la chose. Ce qu’il dit du « con » ou de la « merde » est à cet égard aussi efficace qu’exemplaire.
1. A Day Book, Scribner’s, 1972, repris dans The Collected Prose of Robert Creeley, Dalkey Archive, 2001.