Jerome Rothenberg : Journal Seneca

 
par Gérard-Georges Lemaire

Jerome Rothenberg (né en 1931) est un homme encore trop mal connu en France. Pourtant un certain nombre de traductions ont paru dans notre pays, mais en ordre trop dispersé. Auteur d’anthologies, traducteur, passionné d’ethnographie, il a laissé un corpus important. Ce recueil, qui n’a rien à voir avec Sénèque, doit tout à l’Allegory Seneca Reservation qui se trouve au nord de l’État de New York où Jerome Rothenberg s’est installé à partir de 1972. Journal seneca parle de la culture amérindienne, mais il le fait avec des instruments poétiques qui sont ceux du dadaïsme et du surréalisme. C’est un éclectique qui se revendique comme tel et qui recherche le croisement des cultures, des temporalités et des géographies. Il compose dans ce recueil une sorte de chronique d’un peuple indien qui trouve en lui un historien, mais aussi un recréateur de leurs mythes. Ce livre n’a pas une ossature formelle monolithique : au contraire, il a choisi d’adopter les modalités les plus diverses de l’écriture poétique (et même de la prose) pour raconter l’histoire, les traditions et les mythes des Indiens qui ont vécu dans ce vaste empire que nul n’avait encore corrompu. C’est aussi une sorte d’autobiographie, car, en écrivant, il est devenu un des leurs. Toutes les contradictions de la culture américaine traversent ces pages qui sont fortes et attachantes, qui constituent aussi une histoire de la poésie jusqu’à l’expérimentation la plus hardie. C’est un livre de cette Amérique qui se cherche – et non de celle qui s’affirme haut et fort comme une entité.




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Traduit de l’anglais (États-Unis) par Dider Pemerle
José Corti
« Série américaine »
132 p., 18,00 €
couverture