par Antoine Emaz
Ce livre est d’un lieu et d’une solitude. Une maison en bord de mer, pleine de souvenirs heureux, et puis la mort de la femme aimée, suite à un long cancer. Chaque poème croise ces deux données dans un contrepoint bonheur / tristesse qui nous touche parce que le refus de la mise en scène est égal au refus de cacher. La poésie de François de Cornière est transparente, directe ; ses poèmes courts en vers libres de 4 à 8 syllabes rassemblent des « instants » résistants de vie simple, pleine, mais passée. Comme le paysage marin : « Nous étions restés un bon moment / à regarder ce monde fragile / vibrer se transformer / et enfin s’effacer. » Livre sans plainte, sans mélancolie dépressive, il aboutit plutôt à une forme de sérénité douloureuse : « Aller nager. / Comme un homme qui / – malgré tout – (…) peut encore être heureux. » Le poète sait parler en mode mineur, utiliser la sourdine : pas de révolte contre le tragique, mais la question anodine d’un serveur de restaurant : « Un seul couvert ? » Ce livre retient par l’attention aux sensations, par la mesure du vers, par la sincérité du ton, par l’absence d’images superflues, par la précision du détail juste, par la tendresse.