par Grégoire Sourice
Quelle terreur en nous ne veut pas finir ? est un essai. Frédéric Boyer y énonce une morale de l’accueil d’autrui, dont les migrants incarnent les figures radicales. « À quoi tenons-nous de si fragile que nous ne pourrions le tenir tout en le tendant à d’autres que nous ? » F. B. répond à cette interrogation en se positionnant contre les oracles de l’apocalypse, qui ont l’indécence de crier à l’imminence de la mort de la civilisation européenne, alors même que des milliers de migrants se noient en mer.
L’auteur convoque des valeurs et des mythes qui pourraient faire partie de ce que les conservateurs appellent « Les racines judéo-chrétiennes de l’Europe », racines qui ne sont évoquées, dans leurs discours, que pour établir des différences, et par là même, bâtir cet héritage en citadelle menacée. Contre la réification de l’histoire, Frédéric Boyer appelle à ne pas vivre en archiviste de cet héritage, mais à le vivre héroïquement, en acceptant de le risquer pour l’actualiser. Parce que la morale exige le « courage des sentiments », et que « l’honneur » nous impose de cesser d’humilier les migrants, c’est de la noblesse qui faudrait injecter dans nos vies désaffectées. Celle de ne plus refuser l’épreuve de l’autre, celle d’altérer notre sens commun grâce à l’inexprimable présence de ceux que nous méconnaissons.