par Marie Rousset
En 1362, une bataille. Le peuple a perdu. Pléonasme. Sa défaite perdure. L’affrontement n’est pas fini. Les mots s’échappent et roulent. Ils arrivent jusqu’à nous. Ils observent les traquenards découpés dans le granit de l’âge tendre et de la vieillerie. Tous les âges sont touchés. Aucun n’y survivra. La vie morte la vie nue. La vie est au monde. Elle respire. Elle s’habille. Les lèvres comprennent le jour. Elles ne taisent pas le paysage sanglant. Cf. p. 11 : « Extraire les corps des corps eux-mêmes ». La langue parle aussi la souffrance des végétaux et de l’animal. Au détour d’une page, le plaisir émaille quelques vigoureuses vitalités et l’on se prend à penser que tout le bonheur pourrait se renverser tout à coup sur ce monde blessé. Or, l’immuable et glaçante guerre des guerres revient dans l’épuisé. Tout est épuisant et tout est vivifiant de lucidité dans ce texte de Franck Venaille.