André Ourednik : Wikitractatus

 
par Dominique Quélen

Ce traité nous entraîne, au même titre que nous l’entraînons (« quand je suis trop plein de code, les livres me décodent »). Manière de trottoir aux voies qui bifurquent. Labyrinthe en rhizome. Hypertexte. Et « texte poétique »1 en ceci qu’il se fait chemin(s) faisant. Dans un ordre analphabétique, il emprunte à l’encyclopédie comme à des philosophes choisis de l’aphorisme ou de la brièveté (Cioran, Nietzsche, Wittgenstein) le style assertif et définitoire propre à une autorité supposée sans auteur. L’ambition avouée de celui-ci est de « désérialiser la pensée », d’en détisser le ruban par un abondant système de renvois. Et ça marche. La main à livre vaut la main à clavier ou à écran : « l’asyndète réduite au click : un univers qui s’ouvre entre deux pages ». Wikipédia et Internet sont au passage égratignés autant que loués, car « comme la nourriture, le savoir peut être avalé ou mangé » : des dangers du fast thought. Enfin (?), comme chez Perros mais au sens strict, la préface (« Pour une philosophie de l’itinéraire ») est à l’intérieur, au centre d’un livre2 qui n’a dans son principe ni centre ni circonférence, mais qui fait œuvre au sens où « tout objet d’art est un hyperlien ».




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Hélice Hélas
324 p., 18,00 €
couverture

1. Selon le site de l’éditeur.

2. Ce n’est pas qu’un livre mais aussi « une philosophie digitale » : on consultera utilement ce site, qui en constitue à la fois le développement et le making of.