Par Jean-Jacques Bretou
Depuis le colloque de Londres du 18 juin 1983 où Jean-René Ladmiral, l’un des pères de la traductologie, proposa les concepts de « sourcier » et de « cibliste », le débat perdure entre les partisans d’un littéralisme et ceux s’attachant à la réception du texte par le lecteur. Déjà Antoine Berman était partisan d’une « dédifférenciation conceptuelle » et Meschonnic plaisantait en parlant de « sourbliste » et « circier » tandis que pour Ladmiral, on l’aura compris, il n’y avait véritablement que des ciblistes. Ce livre rassemble les articles que Jean-René Ladmiral a développés sur ce thème depuis 1983, réaffirmant sa position et l’étoffant jusqu’à la prolonger vers des horizons esthétiques, politiques et théologiques. Pour Ladmiral les « sourciers » font preuve de désinvolture épistémologique car, même si la pratique de la traduction est nécessaire pour aborder la traductologie, « il convient de rappeler que rien n’existe sans théorie » et que celle-ci commence en asseyant la dichotomie entre les concepts de sourciers et de ciblistes. La démonstration de Ladmiral est convaincante. On accepte volontiers, à quelques exceptions près, avec lui de croire que les « sourciers » le sont car fascinés par le texte source et qu’ils deviennent « ciblistes » quand il s’agit de traduire. On a pu aimer lire les grands noms qui ont écrit sur la traduction : Walter Benjamin, Georges Mounin, Antoine Berman ou Henri Meschonnic, il faut désormais compter avec Ladmiral et la pierre importante qu’il apporte avec la traductologie dont il est le grand théoricien.