Par Nadine Agostini
« Elle possède deux cahiers dont elle use en même temps. » La femme qui écrit s’inquiète d’un vocabulaire que le lecteur ne saisirait pas, regarde l’humanité, la barbarie, comment les femmes sont soumises depuis le tout début, la lourdeur des corps et les pas pesants, l’autre femme qui s’affaire à confire, elle-même, s’interroge sur l’écriture tout le long. « Toujours la figure du boiteux, du borgne, du bossu, de l’amputé pour rendre compte du poétique. » Même si le nom des bâtiments et des espaces a changé, dans les villages le temps semble s’être arrêté. Les guerres, toutes, les hommes au-dedans d’elles, la torture, l’humiliation, la folie. La femme se tient dans les petits cafés avec les habitués. Elle n’est pas d’ici. Ses regards sont curieux, parfois sans complaisance, attentifs aux petits détails et aux autres. Entre le « elle » et le « je », entre le regard porté sur l’autre et dans le miroir, de tout petits paragraphes nouent les liens. Katy Rémy tisse sa toile, se questionne sur les raisons qu’a l’homme d’entrer en guerre, sur celles qu’il a de tuer par délassement. « Imaginer à quelle régression se soumettent ceux qui plient devant leur peur. » Et puis la peinture, les symboles dans les tableaux.
(juillet-août). « Clairvoir, c’est fixer les ombres. » Ici aussi il est question de l’écriture, sous des formes diverses, des livres des amis, de poésie surtout. « La poésie trame de menus complots linguistiques... Le détournement est la principale source de poésie. » Ici la langue du poète devient nouvel outil linguistique. On y croise des traqueurs de langue, l’aventure stylistique. Ici on dialogue « hors langue ». Du travail du scribe à celui du poète contemporain, une réflexion personnelle sur l’acte d’écriture qui ne manquera pas d’interpeler les écrivains comme les lecteurs et de les entraîner, eux aussi, à fouiller plus avant leur mémoire des textes.