par Florence Andoka
Toute une vie bien verticale est un récit polyphonique où Manuel Daull donne des voix imaginaires aux vies de ceux que l’on côtoie. La voix du poète épouse tous les corps, rêve toutes les vies et l’amour serait ici le moyen d’accueillir en soi la matière de l’autre, ses filiations inconscientes et sa destinée douloureuse, ses failles comme sa bienveillance. Donner une voix aux autres c’est encore, en creux, dire quelque chose de soi, c’est aussi avec humilité replacer sa propre voix dans la multitude des consciences qui tissent le réel. Alors, les monologues s’enchaînent, passent du masculin au féminin, cernent des espaces et la manière dont ils sont investis. La parole délivrée est une longue expiration de l’air intérieur, redirigé sans cesse par le rythme des longs tirets qui articulent chaque phrase.
L’Atelier contemporain œuvre à l’union du texte et de l’image, aussi l’écriture de Manuel Daull est traversée par les photographies en noir et blanc de Stephan Girard, dans lesquelles on souligne la rareté de la figure humaine. Comme Hervé Guibert, Stephan Girard ne photographie que ceux qu’il aime. Gare, fenêtre trouble, balcon offert aux nuages, l’image souvent devient le seuil de l’intériorité et fait ainsi chemin avec le texte.