Marie Cosnay : Le Fils de Judith

 
par Tristan Hordé

Un vieil homme envoie sa fille enquêter à Hambourg pour retrouver des traces d’Eugen, le frère qui s’est suicidé d’une balle dans la bouche. Ce pourrait être le résumé d’une histoire policière, c’est le récit d’une quête d’identité qui n’aboutit pas : Helen comprend qu’elle n’est pas plus la fille du vieillard que celle d’Eugen, comme l’a prétendu une des femmes rencontrées, Magdalena, qui s’est dite sa mère, « Je ne suis née nulle part et surtout de personne ». En 1968, Eugen a traversé l’Allemagne avec Isole (presque Isolde – qu’il abandonnera), jusqu’à Lidice, village de Tchécoslovaquie que les nazis avaient rasé, avant de retourner à Moscou où il enseigne la théorie des probabilités, puis de revenir en Espagne près du vieillard pour y mourir. La simplicité du récit n’est qu’apparente. On y retrouve les motifs qui nourrissaient le précédent livre de Marie Cosnay, Métamorphoses : les motifs du double, avec Helen à qui Isole donne son propre nom, des rêves qui transforment les êtres (dans l’un deux le vieillard devient un monstre marin qui avale Helen), du théâtre à l’italienne où se jouent les violences des hommes. On reconnaît aussi le thème de la porte cochère qui, poussée, ouvre sur d’autres mondes : il commence et achève le récit, avec une Helen qui prend une voix d’homme et un jeune homme sorti d’un de ses rêves. Magnifique jeu du réel et de l’imaginaire.




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Cheyne
« Grands Fonds »
96 p., 16,00 €
couverture