Sylvie Kandé : Gestuaire

 
par Monique Petillon

À New York, où elle vit, Sylvie Kandé, qui a des attaches en France et au Sénégal, a organisé un colloque international dont les actes ont été publiés sous sa direction : Discours sur le métissage, identités métisses (L’Harmattan 1999). Ont suivi deux ouvrages remarqués, dans la collection Continents noirs (Gallimard) : Lagon, lagune. Tableau de mémoire (2000) – avec une postface d’Edouard Glissant – retrace, dans une superbe prose poétique, le parcours douloureux d’une conscience « rebelle » (« j’ai le sang amer mais je sais toutes les routes »). En 2011, une ambitieuse épopée en trois chants, La quête infinie de l’autre rive, évoque ceux qui, par désir d’aventure ou dure nécessité, se lancent dans une navigation périlleuse. 

Plus compact et acéré, son nouveau recueil, Gestuaire, est un défi. Comme Michel Leiris, dans Glossaire, serrait ses gloses, Sylvie Kandé serre ici des « brève(s) de main » : gestes de vie et de mort, de tendresse et de violence. En six sections (D’air et d’eau, Les coups durs, Creuser, Morts en guerre, Qui gagne à être tu, Ce que parler veut dire), elle tente de capter par le langage ce qui « ne s’entend ni ne s’écrit », confie aux mots la tâche d’inscrire les gestes dans la « fragile éternité » du poème. « Car il faut bien admettre qu’en fin de compte c’est le corps qui signe l’aventure poétique ». Et c’est bien le souvenir des gestes (« une façon / de la suspendre au clou sa canadienne », « sa manière en tout cas / de plier sec / le fil du canif dans son manche »), qui restitue avec une émouvante vérité le « Portrait en miettes » d’un père disparu. 




Share on FacebookTweet about this on TwitterPin on PinterestShare on TumblrEmail this to someone
Poèmes
Gallimard
112 p., 12,50 €
couverture