par Jean-Pascal Dubost
Un exercice de style en hommage explicite au posthume 4.48 Psychose de Sara Kane (qui écrivit, « Tu ne peux te tuer que si tu n’es pas déjà mort »), sur quatre questions posées par André Breton à plusieurs écrivains sur l’acte d’écrire, le suicide, l’espoir et la rencontre déterminante, par quoi Christophe Esnault peut déployer, par additions de phrases volontairement apoétiques, alternant les coq-à-l’âne atones, les aphorismes apathiques et les placards visuels, son pessimisme cioranien. En non-suicidé de la société, il aborde dès la première phrase le vif (!) du sujet, « J’écris une note de suicide interminable », s’appuyant en cela, tout au long du livre, sur une forme de prétérition en annonçant continuellement ce qu’il n’accomplit pas : « J’écris pour me taire », ce qui est une manière d’attirer l’attention sur le discours, et dans le même temps de l’affaiblir : écrivant, on peut supposer que Christophe Esnault s’affaiblit lui-même (« les ondes négatives ne manquent pas de me vriller les tempes »). Mais au bout de quelques pages, une sorte de langueur gagne le lecteur ; cela étant, voire est-ce l’effet recherché : tuer le lecteur ?