Nathalie Quintane

 
par Pascale Petit

Ne pas commencer par dire que ce dossier consacré à Nathalie Quintane est savoureux. Évitons le recours à la métaphore culinaire – même si le tout est copieux. « Ce côté crypto-gastronomique de la métaphore française » et tous les autres pans de ladite littérature, le projet de Nathalie Quintane est justement de les déboulonner (métaphore ouvrière) ou de les fusiller (métaphore guerrière) ou de les rectifier (métaphore définitive). Tout a commencé par des Remarques publiées chez Cheyne suivies de Chaussures chez P.O.L. Par des « aphorismes à risque poétique » donc, qui, avec la verbigération, sont un peu la marque de fabrique de Nathalie Quintane. Quand les constats sont littéraires, ils prennent de la valeur. Nathalie Quintane a mené ensuite régulièrement son travail dans tous les genres : une autobiographie, des romans, des pièces, des enquêtes, des essais, des essais d’essais, de l’autofiction pour la plupart publiés aux éditions P.O.L (sauf les livres écrits en collaboration). On ne sait pas si c’est Nathalie Quintane qui ouvre des espaces dans ladite maison ou si c’est la maison qui ménage ces espaces. Une douzaine d’auteurs et de critiques officient dans ce volume pour donner leur point de vue sur une auteur qui apparaît donc à la marge (ou bien au-dessus ou contre ?) – mais considérée du centre : comme un Bartleby ambigu, comme une sorte de dandy inuit venu des classes moyennes qui ne veut pas en être ou bien être toujours où on ne l’attend pas. Elle apparaîtrait, elle disparaîtrait : bref elle laisserait une aura, « l’aura Quintane », après avoir pataugé avec brio et avec ses grands pieds dans la langue : idiote, drôle, ironique, performeuse, ex-performeuse, fantaisiste, réaliste, critique, sorte de Fregoli littéraire. Car l’essentiel, c’est de ne pas participer, a-t-on envie de dire, c’est-à-dire de sortir de cette ornière entre esthétique pure et art engagé. De mettre la langue. De mettre la langue dans la langue – pour faire « œuvre de poésie faciale » comme disait Christophe Tarkos, point.




Share on FacebookTweet about this on TwitterPin on PinterestShare on TumblrEmail this to someone
Sous la direction de Benoît Auclerc
Classiques Garnier
264 p., 29, 00 €
couverture